Joli retour en forme des studios Aardman, avec un long-métrage sur Shaun le mouton (vu pour la première fois chez Wallace & Gromit) brillamment conçu pour tous les publics.
Mais qui revoilà ! Shaun, que l’on connaissait depuis 1995 et « Rasé de près », le génial troisième court-métrage des aventures en pâte à modeler de Wallace l’inventeur et Gromit le chien savant. Issu de la galerie de personnages secondaires bigarrés inventés par Nick Park et les studios Aardman, ce petit mouton débrouillard, très populaire auprès du public, a eu depuis 2007 les honneurs de sa propre série sur petit écran, sobrement intitulée « Shaun The Sheep ». On y suit le quotidien des habitants d’une coquette ferme anglaise, gérée par un fermier un peu benêt qui ne remarque rien des escapades tumultueuses de ses animaux. Couronné de succès, et après plus d’une centaine d’épisode, ce spin-off de « Wallace & Gromit » a cette année les honneurs de la transposition au cinéma, sous la forme d’un long-métrage tout aussi sobrement intitulé « « Shaun The Sheep Movie », ou « Shaun le Mouton » en VF.
On attendait Aardman Animations au tournant, après les déceptions relatives de « Mission : Noël » et « Les Pirates ! Bons à rien, mauvais tout », films plus faibles en regard des précédentes productions des studios. Avec « Shaun le Mouton », l’enjeu est plus modeste quoique pas sans risques : l’univers est bien connu, mais comment le prolonger sur grand écran alors qu’il a déjà été exploité sur des heures de télévision ?
Le film repose sur une trame simple : les campagnards débarquent en ville et découvrent les particularités étranges de la vie urbaine. Par un rocambolesque concours de circonstances, le fermier, devenu accidentellement amnésique, accède à une notoriété soudaine – pour une raison que l’on ne dévoilera pas – tandis que son fidèle compagnon canin et son non moins fidèle troupeau de moutons partent à sa recherche. On pouvait craindre une succession de scénettes réchauffées reposant sur le décalage ville-campagne, et pourtant le film étonne par sa capacité à créer des quiproquos réellement drôles lorsque la troupe introduit le chaos à l’hôpital, dans un restaurant huppé, à la fourrière… On appréciera ce second souffle apporté à ces situations comiques vues et revues, rehaussées par l’absence de dialogues et l’omniprésence de petits gags visuels.
Parce que ses héros sont des ovins, « Shaun le Mouton » ne pouvait passer à côté d’une réflexion sur le conditionnement et l’aliénation des animaux et des humains, mis au pas par la mécanisation, la réglementation, ou les stéréotypes de classe. Toujours subtile, elle est à l’origine de nombreuses blagues et se superpose sans peine à toute une série de confusions engendrées par les déguisements et les faux-semblants, plus faciles à apprécier par un jeune public.
Ce sont là les immenses qualités de « Shaun The Sheep » : réussir l’équilibre parfait de la double lecture, en conciliant l’intelligence du message avec le rythme quasi-impeccable d’un récit initialement peu engageant. Les studios Aardman n’ont rien perdu de leur génie, et livrent l’un des meilleurs films d’animation contemporains.
Shaun le Mouton
De Mark Burton et Richard Starzak
Avec Justin Fletcher, John Sparkes, Omid Djalili
Distributeur : Impuls
Sortie le 18 mars 2015