La folie d’un homme qui se balance entre le deuil, le désespoir et l’amour de ses racines. Une danse presque macabre pour un esprit torturé face au système implacable d’une société où il n’a plus sa place. Les besoins d’un adulte, les traumatisme de l’enfance et les souvenirs fantasmés produisent un cocktail explosif pour un drame véridique.
Peter Kneubühl vient de perdre sa mère et occupe sa maison plus ou moins illégalement depuis. Sa famille veut vendre ce bien, mais Peter ne l’entend pas de cette oreille. Il tente sans succès de les raisonner en s’attaquant de façon délirante à la loi qu’il pense contre lui. Il tombe progressivement dans des théories conspirationnistes politiques et sociales.
Ne s’adaptant pas dans une société moderne qui va toujours de plus en plus vite, il ne gère pas le flux d’informations qu’il ingère tout azimut. Il développe alors une psychose qui le mènera à encore plus de brouillard dans ses relations avec son voisinage et les autorités globales. Alors qu’il transforme la maison en bastion, il blesse un policier grièvement et s’enfuit dans une cavale de près d’une semaine. Ce fait divers qui a défrayé la chronique de Bienne en 2010, dépeint un homme en totale perte de vitesse avec son époque. Il est clair qu’il a développé une psychose face à ce monde qu’il ne comprend plus, qu’il ne reconnaît plus.
On pourrait disserter sur les raisons de ce drame social sans parvenir à une conclusion vraiment arrêtée. Bien que les journaux et les rapports judiciaires de l’époque, comme ceux d’aujourd’hui, parlent de Peter K. Comme d’un forcené, il faut tempérer les à priori afin de démêler le vrai du fantasmé. Bien entendu, cet homme a besoin d’un soutien thérapeutique, mais nul n’a besoin de charger la mule. Le scénario et la réalisation sont entrecoupés d’images et de vidéos d’archives qui tissent une toile plus concrète de cette affaire. Son histoire est certainement le miroir de la vie moderne de plein d’autres, même si tout le monde ne passe pas autant à l’acte. Peter K. A simplement été poussé dans ses retranchements et avait l’infrastructure pour déraper.
Ce qui ressort le plus c’est la croissance de la méfiance du protagoniste. C’est ce qui a permis à la psychose de grandir aussi vite. Ce genre de drame est l’écho des nouvelles dépressions sociales. Plusieurs scénarios se jouent tous les jours, mais seuls ceux qui ont des issues funestes sont révélées.
Dans un monde toujours plus connecté où la vie publique, que l’on expose volontairement aux yeux de tous, devient la plus importante jusqu’à occulter totalement et dangereusement, l’identité de chacun est potentiellement en perte d’existence.
Ce film revient sur un simple fait divers qui est une alerte à bien des dérives modernes. Ce que nous appelons banalement faits divers, devraient être pris plus au sérieux. Ce sont les signaux d’alarme des mal-êtres de nos vies.
Peter K – Seul contre l’Etat
CH – 2021 – 99min – Drame
Réalisateur:Laurent Wyss
Acteur:Beat Albrecht, Hanspeter Bader, Sibylle Brunner, Leonard Kocan, Manfred Liechti, Stefanie Günther Pizarro, Nathanael Schaer
Aardvark Films
08.02.2023 au cinéma