Le (petit) buzz du NIFFF pour commencer, avec l’américain « Excision », comédie horrifique sur le mal-être adolescent, un sujet éculé mais sympathiquement mis en scène par Richard Bates Jr. Son héroïne, Pauline, est la freak du lycée : boutonneuse, rachitique, cheveux gras, elle se destine à devenir chirurgien et chérit ce rêve en fantasmant dans son sommeil des opérations saignantes (passages oniriques graphiquement réussis). Mais son caractère impossible lui aliène tout le monde : sa mère obsédée du contrôle qui peine à l’aimer, ses camarades de classe, ses professeurs. Seuls son père et surtout sa sœur tentent de la comprendre. Porté par un casting ultra cool (Traci Lords, John Waters, Ray Wise, Malcolm McDowell), en particulier l’actrice principale Anna Lynne McCord, le film fonctionne bien, surtout sa scène finale, sans toutefois révolutionner quoi que ce soit.
« Eddie The Sleepwalking Cannibal », coproduction dano-canadienne, a surpris par son scénario : Lars, peintre danois célèbre en panne d’inspiration, va faire le prof dans un bled paumé et se retrouve à devoir baby-sitter un attardé mental, fils de la mécène de l’école. Lars va vite découvrir qu’Eddie est somnambule et dévore des animaux vivants – voire des humains ! – dans son sommeil. D’abord horrifié, il va ensuite cacher les crimes d’Eddie, car ceux-ci lui permettent de retrouver son inspiration et de peindre des œuvres fortes. Cela aurait pu être un film sérieux, mais Boris Rodriguez a choisi l’angle de la comédie, et on lui en sait gré. Plein de moments très drôles, avec un intéressant regard sur le processus créatif, une bonne surprise.
Un autre Nikkatsu, un autre « roman porno » ! Mais cette fois-ci dans le cadre du jidaï geki (film en costume japonais). Le destin tragique d’une prostituée dont le souteneur se sert sans scrupules, balancée entre ses sentiments et l’envie de couper les ponts. Beau, bien réalisé, rempli de personnages intéressants, « The Hell Fated Courtesan » sort du lot des « roman porno » de base. On sent la patte de techniciens blanchis sous le harnais, qui magnifient ce film d’exploitation.
Un blockbuster hongkongais prend le relais. Grosse comédie sentimentale calibrée pour sortir au Nouvel An chinois, « The Great Magician » dispose d’un budget confortable (les effets spéciaux ne font pas peine pour une fois) et d’un casting de choix (Tony Leung Chiu Wai, Ching Wan Lau et même un caméo de Tsui Hark). Un magicien surdoué a abandonné sa femme pour parfaire son art en Europe. Il revient après trois ans et essaie de la récupérer, alors qu’elle a été kidnappée par un seigneur de guerre qui veut la séduire. Un aimable divertissement familial, sans plus.
« Maniac » a claqué le beignet de plus d’un spectateur. Réticent au départ, force m’est de reconnaître que, une fois n’est pas coutume, le remake se défend. Partant dans une direction radicalement différente de l’original de Lustig de 1980, Khalfoun (suivi de très près par Alexandre Aja semble-t-il, vu le résultat) met tout le monde d’accord. La dimension hommage se résume à un superbe plan sur une aile de voiture reprenant la légendaire affiche d’époque, et au plan titre, avec un superbe lettrage rouge massif. La musique reprend un esprit eighties dans la lignée de « Drive », mais pour le reste, c’est bien d’un nouveau film qu’il s’agit. Elijah Wood interprète avec sensibilité cet homme impuissant, traumatisée par une mère volage qui l’a délaissé, incapable de construire une relation saine et qui se venge sur les belles jeunes femmes qu’il traque. Il garde toujours un petit scalp en souvenir, pour en vêtir les mannequins qu’il conserve comme compagnes dans son antre. La mise en scène privilégie une vue subjective hyper immersive, entrecoupée de quelques plans où notre maniaque se voit dans un miroir ou une vitre. Véritable plongée dans la psyché d’un psychopathe, on sort secoué de ce voyage, qui en outre a les couilles de ne pas lésiner sur le gore (la séquence finale sort des tripes, c’est le cas de le dire). Bravo !
Pour finir la journée, un double-programme série B de la Nikkatsu, comme au bon vieux temps des cinémas de quartier. D’abord « Stray Cat Rock : Sex Hunters », de 1967, un action movie racontant les luttes entre un gang de jeunes délinquantes, et une bande de malfrats. Premier film de la splendide Meiko Kaji, qui se fera un nom chez la Toei avec la série des « Female Convict Scorpion ». On a aussi un fort sous-texte sur les problèmes de racisme, le chef du gang des Eagles désirant se venger des métis nippo-américains, car sa grande sœur s’est fait violer sous ses yeux par des soldats américains quand il était petit. Une très chouette mise en scène et une anarchie vivifiante dans les péripéties permettent de savourer le film comme un bonbon acidulé jazzy !
Ensuite un des « roman porno » les plus extrêmes, avec « Assault Jack The Ripper » et son duo de tarés. Un jeune pâtissier découvre que le meurtre l’excite comme aucun rapport sexuel ne l’a jamais fait. Entraîné par une jeune perverse délurée, il va éventrer au couteau à pâtisserie tout ce qui bouge. Empruntant un peu au giallo (les meurtres par poignardage dans le vagin : ouch !), un peu moins érotique mais plus violent, le body count est hallucinant. Les rares femmes présentes dans la salle ne sont pas prêtes de remanger des gâteaux !
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