Matteo Tortone : « "Mother Lode" est une fable contemporaine sur la recherche de l'or »

Le réalisateur Matteo Tortone raconte d’une façon très poétique mais terriblement triste le destin d’un jeune Péruvien parti chercher de l’or dans des conditions extrêmes. Une réflexion sur la valeur de l’argent, de l’or et de ce qu’on est capable de faire.

Pouvez-vous nous raconter en quelques mots de quoi parle votre film ?
« Mother Lode » est une fable contemporaine sur la recherche de l’or et le film se déroule au Pérou, entre Lima et la Rinconada qui est en fait la ville la plus haute du monde, située à 5’300 mètres. Le film raconte le voyage d’un jeune qui part de Lima pour chercher à s’enrichir dans le but de donner un futur à sa famille en cherchant l’or dans les mines artisanales. Et donc, le film, c’est un voyage très physique, mais ça devient de plus en plus un voyage spirituel.

« j’ai cherché un lieu qui pouvait exprimer au niveau esthétique la conquête d’un espace »

Comment est né le projet « Mother Lode » à la Rinconada ?
J’ai travaillé sur le concept du film pendant cinq années avant d’écrire quelque chose. Je cherchais une histoire à raconter sur la recherche d’or qui est l’autre face cachée de la crise économique et de la relier aussi à un côté métaphysique qui est présent plus ou moins dans toutes les parties du monde liées à la mine artisanale. Et donc j’ai cherché un lieu qui pouvait exprimer au niveau esthétique la conquête d’un espace qui est lié à la production de richesses et je suis tombé sur des images de la Rinconada qui encore aujourd’hui me semble toujours un village lunaire parce que c’est construit au-dessus d’un glacier.

C’était difficile de tourner un film à la Rinconada ?
On a fait un grand travail. On avait une médiatrice culturelle qui a travaillé pendant quatre années pour nous donner la possibilité de rester et y travailler pour des semaines et construire des relations avec les gens qui habitent là-bas. Parce que le but ce n’était pas de voler des images de la Rinconada mais c’était plutôt de construire une confiance et faire un film ensemble avec tous ceux qui habitent là-bas.

Il y a eu de la méfiance ou des difficultés tout de même pendant le tournage ?
Le lieu est très difficile au niveau physique parce que c’est à 5’300 mètres, donc on a des problèmes de respiration, il faut s’adapter à l’altitude, à la météo, etc. Mais ça a été plutôt facile du côté humain parce qu’on n’était pas perçus comme des journalistes, on était là pour faire un conte métaphorique sur un sujet universel.

« c’était un choix esthétique important pour pouvoir remettre en discussion le concept de la valeur qu’on donne à l’argent, l’or et à la vie humaine. »

Pourquoi le choix du noir et blanc ?
On a tourné en couleurs mais on a choisi de réaliser un film en noir et blanc au tout début de la production pour plusieurs raisons. J’ai toujours pensé à ce film comme à un film sur la course contemporaine au niveau mondial, donc une histoire qui se base sur des histoires péruviennes mais qui est avant tout une histoire métaphorique valable pour tout le monde. En plus avec le noir et blanc, on a une vision plus générale, uniforme et on évite de souligner le côté exotique des différents lieux qu’on traverse pendant le film. L’or non plus n’est pas mis en avant avec le noir est blanc et pour moi, c’était un choix esthétique important pour pouvoir remettre en discussion le concept de la valeur qu’on donne à l’argent, l’or et à la vie humaine.

Qu’attendez-vous du public comme réaction ?
J’attends que le public ait une réflexion sur la valeur de l’argent. Le film est déjà sorti en Italie et ce qu’on a pu constater également dans les festivals, c’est que le film donne la possibilité à chaque spectateur de se perdre dans les images mais aussi dans ce vécu.