« Lumière ! L’aventure commence » de Thierry Frémaux, raconte les débuts du cinématographe à travers une sélection de 108 « vues » Lumière. Tantôt drôles, intrigants ou captivants, ces films émeuvent par leurs portées esthétique et historique.
Le cinéma serait né un jour de 1895 en France, plus précisément à Lyon. C’est du moins la date retenue par l’historiographie française. C’est aussi celle choisie par Thierry Frémaux pour son film « Lumière ! L’aventure commence« . On comprend par la suite qu’il s’agit en réalité d’un abus de langage et qu’en fait de cinéma, c’est plutôt du cinématographe dont il est question. Qu’à cela ne tienne, l’histoire est jolie et l’exactitude importe peu. Le cinématographe donc. Appareil des frères Auguste et Louis Lumière, breveté en février 1895, il permet la captation sur pellicules de « vues » – c’est le terme technique – d’une durée de 50 secondes. C’est donc dans la ville de Lyon qu’est activée pour la première fois la manivelle, avant que les opérateurs Lumière ne soient envoyés dans toute la France, et enfin, à l’étranger, animés par un goût de l’ailleurs (aussi iront-ils jusqu’à Genève filmer l’Exposition Nationale Suisse de 1896). De ces innombrables prises de vue, Thierry Frémaux en a sélectionné 108 pour en faire un film. Directeur de l’Institut Lumière et délégué général du Festival de Cannes, le voici désormais réalisateur et documentariste. Abordés par thématiques (La ville, l’enfance, la France au travail, etc.), ces petits bouts de pellicules demeurent d’une valeur esthétique et historique rare. Les scènes de la vie urbaine, l’entrée des trains en gare de La Ciotat ou de Perrache constituent autant de moments canonisés où le spectateur est pris par l’émotion qu’exhalent ces petits morceaux d’histoire sauvés de l’oubli et de la dégradation.
Les commentaires laudatifs de Thierry Frémaux, d’une voix rocailleuse et enrouée, accordent au film un ton professoral et admiratif. Certains classiques comme « La sortie de l’usine Lumière », « L’arroseur arrosé », « L’entrée du train en gare de La Ciotat » n’en finissent pas de fasciner. A leurs côtés, quelques magnifiques raretés comme ces images d’un village vietnamien où les enfants s’amusent de la présence de la caméra. Toute sorte d’expérimentation et d’essais apparaissent sous nos yeux. Les tentatives de faire rire, souvent ratées et surjouées, n’en sont que plus touchantes, car elles ont pour elles la candeur des premières fois. Déjà, la prise de vue en mouvement renferme toute la magie de ce qui n’est pas encore art, et pas tout à fait cinéma. Sis sur un train, un trottoir ou le toit d’un immeuble, le cinématographe capte le défilement de la vie, l’avancée dans l’espace. Et ces images, illusions porteuses de rêve, conquièrent les cœurs.
Le film s’achève en laissant soin au spectateur de composer, au gré de ses connaissances et des affinités, la suite d’une aventure qui, 120 après ses débuts, n’en finit pas de captiver. De cette épopée lyonnaise, il ne faudrait toutefois pas oublier qu’elle ne fût pas la seule. Ce que le film ne dit pas – volontairement, on l’en soupçonne – c’est qu’en ce temps-là, la même fougue animait des « inventeurs » en Allemagne (les frères Skladanowsky), en Angleterre, ou aux Etats-Unis (Edison).
Lumiere! L’aventure commence
FR – 2016 – 90 Min. – Documentary
Réalisateur: Thierry Fremaux
Filmcoopi
04.10.2017 au cinéma