En 1988, Stephen Frears adapte sur grand écran l’une des œuvres littéraires majeures du 18e siècle : « Les Liaisons dangereuses ». Cette année, le réalisateur Whit Stillman s’intéresse au livre « Lady Susan » de Jane Austen, également important dans la littérature anglaise du 18e siècle, qui relate un échange épistolaire entre Lady Susan et son amie et confidente Alicia, une exilée américaine.
Le réalisateur du film « Metropolitan » propose une nouvelle approche d’un thème déjà longuement abordé dans les filmographies contemporaines. Celui de mettre en valeur les divers stratagèmes d’une femme veuve dans la société du 18e siècle souhaitant annihiler ses dettes dès la mort de son premier mari.
La proposition cinématographique que développe Whit Stillman est de répartir l’action des personnages en trois lieux différents. Il amène dès les premières minutes le spectateur dans une atmosphère très anglaise, en présentant la ville de Landford, la demeure de Lady Susan lors du décès de son mari Sir. Vernon, puis déplace l’intrigue au manoir Churchill, le lieu de résidence de la belle-famille de Lady Susan, composé principalement par Sir Charles Vernon, sa femme Miss Catherine Vernon et son frère Reginald DeCoucy et termine par Londres. En effet, la capitale du Royaume-Uni jouera un rôle propice quant au bon déroulement de l’intrigue du triangle amoureux entre Lady Susan, Reginald DeCoucy et Lord Manwaring. Cette ville représentera aussi le repaire le plus sûr pour Lady Susan et Alicia lors de leurs discussions stratégiques.
Le travail qu’entreprend Whit Stillman reste très difficile à mettre en valeur, en effet, il se confronte à une adaptation d’un livre publié au 18e siècle par conséquent, il est primordial pour celui-ci de créer un rythme lent tout en apportant une touche british. Le spectateur est ainsi transporté dans le film sans vivre un décalage temporel ou d’époque. Malheureusement, cette approche nuit considérablement à l’intrigue s’appuyant sur l’urgence et l’angoisse que peuvent éprouver Lady Susan Vernon ou sa fille Frederica Veron face aux choix des meilleurs partis pour leurs mariages respectifs. La durée courte pour ce genre de film, seulement 1h30, génère une grande difficulté pour les acteurs de transmettre leurs émotions au spectateur.
Cependant, « Love and Friendship » permet aussi de plonger dans les années 1800 et de découvrir une nouvelle approche de l’étiquette anglaise. Le film est en effet rempli de clins d’œil ou de stéréotypes – pour n’en citer que deux, la courtoisie des gentlemen envers les femmes mondaines et l’heure du thé. Il est cependant intéressant de contraster ces clichés car, malgré l’étiquette presqu’irréprochable des nombreux personnages, il existe toujours l’exception ridicule qui ferra sourire le spectateur lors sa tentative désespérée d’intégrer le prestige des familles anglaises.
« Love and Friendship » reste donc un film attrayant pour le spectateur qui souhaite plonger dans l’univers british du 18e siècle et admirer le bon travail du réalisateur quant aux choix de la musique orchestrale, des costumes, des ambiances et des lieux qui restent un régal pour les yeux.
Love and Friendship
De Whit Stillman
Avec Kate Beckinsale, Chloë Sevigny, Tom Bennett, Stephen Fry
Frenetic Films
Sortie le 22/06