Laurence Deonna reprend sa vie depuis son enfance genevoise dans une famille calviniste classique et politisée, devant une caméra discrète et respectueuse des aléas de ses aventures. Catapultée presque malgré elle reporter de guerre, elle tombe amoureuse des civilisations, des humains et de l’écriture et des classes sociales. Sa compréhension, des différences et des forces qu’elles engendrent, devient rapidement son leitmotiv et l’accompagnera désormais dans ses rencontres et façonne son ouverture sur le monde.
Un documentaire biographique réalisé avec un rythme juste entre images d’archives, photographies d’époque et interviews actuelles. Le portrait d’une femme de caractère, fragile et poétesse aux facettes multiples, comme tous les humains qui grandissent dans un carcan contraints de faire bonne figure et d’oublier de vivre. Heureusement, les qualités et les défauts qui définissent Laurence Deonna lui ont permis et lui permettent toujours de croître sans cesse afin de trouver un équilibre de vie. Cette journaliste autodidacte et écrivaine continue d’apporter sa résistance à un monde d’hommes construit par eux, qui ont comme faiblesse d’être sortis d’un ventre féminin.
La guerre des nations, la guerre des mondes, celle des religions, celle des classes et celle des sexe sont similaires dans la volonté d’avancer et d’exister en faisant fi des libertés des autres. Est-ce l’essence même de l’humain que de chercher l’inconnu afin de se rencontrer soi-même ? Comme bien des femmes et certains hommes également de son époque et hélas encore aujourd’hui, ses écrits et reportages dérangent autant qu’ils motivent et encouragent.
Ce documentaire est aussi une magnifique fenêtre sur l’identité d’un monde arabe qui a peu traversé les frontières occidentales et américaines. À l’heure où l’islam est synonyme de résumé des civilisations orientales bien à tort, ce genre de témoignage est essentiel à la réhabilitation de l’héritage de régions qui sont le berceau de beaucoup de peuples constructeurs des politiques et traditions modernes. Sans passer dans les clichés pro-arabe, Laurence Deonna est un porte-parole pour l’authenticité de la réalité des populations orientales qui, comme partout, sont tenues et protées par les femmes à la barbe d’hommes naïfs de la puissance de leur pouvoir de chimères.
Presque deux heures d’hymne à la liberté et à l’aventure qui saura certainement soulever les ambitions timides d’autres femmes et hommes qui ne demandent qu’à devenir les héritiers de Laurence. Ce sont ces personnages de l’histoire sociale qui finalement nous font avancer, permettent aux idées d’évolutions de vivre et de se personnifier.
Laurence Deonna, libre !
CH – 2018 – Documentaire – 95min
De Nasser Bakhti
Troubadour Films
16.03.2022 au cinéma