Knock est un médecin hors du commun. Il sait où se cache la maladie, même si le patient ne la soupçonne pas. « Les gens bien portants sont des malades qui s’ignorent ! » En arrivant dans le petit village de Saint-Maurice sur la frontière franco-suisse, ce grand, ce très grand médecin va chambouler toute la quiétude des habitants, qui en redemanderont. Seul point noir, le curé, qui trouve louche que ses ouailles nourrissent un tel engouement pour une autre personne. Un bras de fer infantile et sournois commence alors.
Tiré de la pièce éponyme de Jules Romains jouée pour la première fois en 1923 à Paris, cette comédie humaine est un courant d’air frais dans les heures sombres du climat mondial actuel. Au départ, Knock n’est pas médecin, mais lorsqu’il obtient un poste d’officier de santé sur une croisière de six mois, une vocation naît. Il s’inscrit ensuite à la faculté de médecine de Marseille avant de déménager dans les montagnes pour bouleverser les habitudes des villageois de Saint-Maurice. Arrivé sur place, ses clients sont ravis que quelqu’un soit aussi concerné par leurs petits bobos, leurs angoisses imaginaires et leurs véritables maladies. Le curé est d’un autre avis. Plus le cabinet de Knock se rempli, plus l’église se vide. Coïncidence ? Le serviteur de Dieu ne le pense pas et se lance dans une véritable enquête pour ternir la réputation de son rival qui s’ignore.
Nous rentrons très vite dans ce tourbillon de comédie caustique et de vaudeville. Les personnages sont naturellement hauts en couleur. Nous retrouvons des classiques comme le couple de pharmaciens lui cocu, elle est capricieuse et volage. L’exploitante agricole autoritaire et fortunée. La veuve joyeuse qui s’ennuie et ne sait plus que faire de ses deniers. Le facteur alcoolique, idiot et serviable, le vagabond porteur d’informations sombres sur le passé de Knock, la petite employée de ferme mignonne et gentillette, le curé bien entendu plus pêcheur que les pêcheurs et à la compassion plus que discutable. Tout ce petit monde et les autres vont se mêler dans un tournoiement enivrant qui les mènera finalement à l’harmonie. Les caractères de la fresque humaine y sont importants et nous pouvons tous nous identifier malgré leurs traits satiriques. Le sujet que soulève ce film, bien qu’il soit une interprétation de l’œuvre originale, est somme toute l’adaptation et les préjugés qui l’accompagnent. Quelque soit votre personnalité, votre histoire personnelle, votre objectif et ce que vous pouvez apporter à une nouvelle situation, vous serez seul. Plus vite nous comprenons que tout ce que nous sommes et ce que nous construisons nous incombe plus vite nous avancerons. Il y a toujours quelque chose qui ne plaira pas aux autres, quelque chose qui leur semblera étrange et quelque chose qui leur conviendra. Bousculez leur quotidien et vous verrez surgir les courageux qui prendront part à la construction du changement et détaler, pour mieux médire et les lâches trop frileux pour prendre le train en marche.
Côté technique, la réalisation comprend parfaitement l’essence de l’histoire, sans trop en faire, avec subtilité et intelligence. La lumière est toujours assez claire comme pour se mettre en osmose avec les idées et la volonté de Knock. Lorsque l’on pense que la tempête retombe, c’est pour mieux en commencer une autre. Le rythme est trépidant et le résultat est splendide. La distribution est en adéquation avec le caractère des personnages. Nous pouvons ressentir jusqu’à la fraîcheur de l’air alpin. Beaucoup de poésie aussi, cachée ça et là jusqu’à la fin. Cette quatrième interprétation pour le cinéma est plus que réussie. Je dois saluer le jeu d’Omar Sy que je ne pensais pas capable d’autant de justesse dans un rôle complexe comme celui-ci. La comédie reste tout de même le domaine le plus difficile à jouer. Malgré les apparences, il est plus facile d’effrayer ou d’être impassible que de réussir à faire rire. C’est donc un pari gagné. Pour le théâtre, pour le cinéma et pour… la médecine !
Knock
Réalisateur : Lorraine Lévy
Acteurs : Omar Sy Ana Girardot, Alex Lutz, Sabine Azéma
Pathé Films
18.10.2017 au cinéma