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samedi, décembre 21, 2024
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Jupiter Ascending, vers l’infini et l’au-delà

Initialement prévue pour juillet 2014, la nouvelle super-production des réalisateurs de Matrix fut repoussée dans l’optique de peaufiner la post-production et ses nombreux effets spéciaux. Cependant, tout semble indiquer que Warner Bros ne croit guère plus au film et ce malgré leur investissement massif dans le projet – le film coûta près de 200 millions. Jupiter Ascending s’impose pourtant comme un space opera divertissant, certes handicapé par un scénario convenu, mais doté d’un riche univers et de nombreuses fulgurances.


Quelque part entre les écrits de Charles Perrault et les aventures intergalactiques de Star Wars, Jupiter Ascending s’inscrit dans une narration de contes, puisque l’on y suit Jupiter – une jeune femme travaillant comme nettoyeuse – découvrir qu’elle possède une importance particulière dans l’univers. Prise pour cible par les puissants et maléfiques membres de la famille Abrasax, elle sera protégée par Caine, un ancien soldat mi-homme, mi-loup.

Si l’ambition de moderniser les structures archétypales des contes en l’ancrant dans les codes de la science-fiction était un pari aussi risqué que passionnant, le résultat à l’écran ne convainc pas totalement, la faute à un scénario étouffé et à des arcs narratifs qui semblent imposés. Face à l’envergure d’un tel projet, seul le recours aux gros studios américains permettait sa concrétisation, ce qui entraîne certains compromis inévitables. Parmi ceux-ci se trouve l’obligation d’ouvrir le film à un public le plus large possible, ce qui explique les quelques écarts comiques, maladroits car inhabituels chez les Wachowski, ainsi que les trames narratives convenues que le récit adopte parfois. Une surprise lorsque l’on repense aux expérimentations fructueuses qu’ils avaient entreprises dans Speed Racer et surtout dans Cloud Atlas.

Jupiter

Ces petits sacrifices s’effacent toutefois en raison de l’univers foisonnant élaboré par les Wachowski, ces derniers proposant de replacer la Terre dans l’univers et de repenser l’histoire de l’humanité. La richesse de leur création s’étend autant dans les nombreuses races extraterrestres que dans la technologie et l’armement exploités dans le film. La relative courte durée de ce dernier force toutefois les Wachowski à placer plusieurs passages explicatifs. Si ces scènes peuvent paraître légèrement didactiques, elles s’avèrent totalement nécessaires : sans elles, le spectateur se retrouverait largué aux confins de nouvelles galaxies, dont le fonctionnement lui serait impossible à percevoir.

La créativité des réalisateurs leur permet de proposer un bon nombre de scènes et situations qui échappent à la logique esthétique à laquelle le public est usuellement exposé. Certains gadgets redynamisent l’espace et offrent ainsi la possibilité aux Wachowski d’aborder les perspectives sous de nouveaux angles. Lors des scènes avec les patins gravitationnels de Caine par exemple, les repères géographiques du spectateur sont brouillés en raison du glissement des pôles horizontaux et verticaux. Toutes les scènes d’action se déroulant à Chicago prennent ainsi une tournure inédite, à l’image des scènes futuristes de X-Men : Days of Future Past et des vortex créés par la mutante Blink.

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Chez les Wachowski, il y a cette science de l’image et cette fluidité du mouvement qui leur permettent d’offrir un spectacle unique. La scène où Caine et Jupiter se font prendre en chasse par une flotte d’extraterrestres représente l’une des séquences d’action les plus stimulantes et inventives de ces dernières années. Du haut d’un gratte-ciel, les personnages entament une chute vertigineuse qui se poursuivra en un carambolage aérien des plus spectaculaires ; virevoltant dans l’espace, la caméra des Wachowski capture ce ballet ascensionnel dont la circularité se décline à tous les niveaux, autant dans le plan que dans l’espace, mais aussi à travers les vaisseaux et leurs ailerons rotatifs. L’implication physique et rythmique de cette poursuite laisse le spectateur essoufflé.

Dans cet enchaînement de scènes haletantes, les acteurs naviguent dans leur registre respectif. Si Mila Kunis n’arrive pas toujours à trouver le juste ton, Channing Tatum confirme quant à lui son talent en incarnant parfaitement son personnage mutique et sauvage. Parmi les nombreux rôles secondaires, Eddie Redmayne livre sans doute la prestation la plus risquée en campant Balem, un antagoniste colérique mais chétif qui chuchote plus qu’il ne parle. Malheureusement, la tentative ne fonctionne guère à l’écran, les excès de tempérament paraissant peu crédibles. La faute réside toutefois davantage dans le concept du personnage que dans la performance de l’acteur, qui au contraire parvient à éviter d’être risible. Enfin, la composition orchestrale de Michael Giacchino n’atteint pas la géniale collaboration obtenue sur Speed Racer et s’affiche plus comme un travail générique. Ceci dit, le musicien réussit assurément à insuffler une dimension épique à l’ensemble, spécialement grâce à ses splendides passages choraux.

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Au final, le plaisir que procure Jupiter Ascending entraîne aussi une certaine frustration, celle d’avoir conscience de la richesse de l’univers créé par les Wachowski mais de n’avoir accès qu’à quelques fragments de celui-ci, en raison de la nécessité pécunière de rendre le film accessible à tous les publics. Malgré ses nombreuses qualités et sa fructueuse combinaison d’éléments, Jupiter Ascending demeure une entreprise risquée qui trouvera difficilement son public, notamment à cause du penchant des réalisateurs à dépeindre des personnages et un univers hétéroclites qui pousse le film aux limites du ridicule – ce qui était déjà le cas de l’excellent Cloud Atlas. Si le long-métrage n’y tombe jamais, son premier degré absolu risque tristement de pousser certains spectateurs à la moquerie ; une attitude regrettable puisque l’on tient là précisément la crème du blockbuster, celui qui risque et qui ose, celui qui tombe et qui se relève. Les Wachowski élèvent Jupiter Ascending au-delà de la nébuleuse production dominante et continuent de lutter contre l’asservissement esthétique qui enterre toute ambition cinématographique. Et pour cela, on ne peut que les remercier et se laisser embarquer dans leur voyage aux confins de l’univers.

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3 Commentaires

  1. Franchement un bon divertissement mais c’est vrai qu’on s’attendait à voir qqch de MATRIX. Là, c’est juste un divertissement avec de l’action et beaucoup trop de romance pour pas grande chose….

  2. Très bonne surprise, les deux heures passent plutôt vite et j’ai bien accroché à l’univers développé 🙂 par contre certaines scènes d’action durent trop longtemps à mon goût donc même si ça bouge bien… ça finit par lasser aussi.

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