Ryan Coogler offre un 1er round à Adonis Creed – et surtout un 7ème round à Rocky Balboa – qui frise la perfection et relance avec succès l’une des plus belles franchises du cinéma.
L’annonce d’un reboot de « Rocky », focalisé sur l’ascension du fils illégitime d’Apollo Creed (le meilleur ami et adversaire de Balboa) et développé par le jeune réalisateur Ryan Coogler (« Fruitvale Station »), avait de quoi laisser véritablement songeur. Le long métrage de 1976 écrit et interprété par Sylvester Stallone, naïvement assimilé par certains à du divertissement commercial désuet, reste encore aujourd’hui un chef d’œuvre. Car « Rocky » est à la fois une magnifique histoire d’amour, une quête identitaire bouleversante et l’illustration par la boxe du combat universel pour le droit d’exister. Il semblait dès lors impossible d’envisager une relecture moderne réussie, d’autant plus que la saga Rocky a toujours reposé sur son personnage principal, véritable alter ego cinématographique de Stallone.
En effet, le parcours du boxeur italo-américain peut être vu comme le reflet de la carrière de l’acteur et réalisateur septuagénaire : une ascension rapide (« Rocky »), une confirmation (« Rocky 2 »), une baisse de régime suivie d’une remise en question (« Rocky 3 »), une (auto)glorification maladroite (« Rocky 4 »), un premier héritage manqué (« Rocky 5 ») et un comeback inattendu (« Rocky Balboa »). La première tentative de diversification de cette success story, au travers d’un cinquième opus mineur axé sur le déclin de Rocky relégué au (second) rôle d’entraîneur, s’était traduite par un échec commercial et critique cuisant. A l’image de son personnage, Stallone avait été incapable de transmettre son héritage à une nouvelle génération, incarnée à l’écran par le rôle de Tommy Gunn. L’étalon italien semblait donc avoir définitivement tiré sa révérence en 2006 avec un 6ème opus des plus réussis (« Rocky Balboa »).
Finalement l’héritage de « Rocky », mais également celui d’un certain type de cinéma populaire quelque peu disparu, a été réclamé par le jeune réalisateur Ryan Coogler. Tout comme son personnage principal Adonis Creed Johnson, le metteur en scène et scénariste californien est allé chercher Stallone/Balboa, qu’il a réussi à convaincre notamment grâce à son premier film « Fruitvale Station » (sorte de « La Haine » version Sundance). Ayant parfaitement compris l’essence de la saga, Coogler ne s’est pas limité à une simple relecture moderne opportuniste du premier « Rocky ». En effet, tout en épousant la structure narrative standard d’un épisode de la franchise, Coogler parvient à livrer sa propre « underdog story ». Mais « Creed : L’Héritage de Rocky Balboa » ne se limite pas uniquement au combat identitaire du jeune Adonis Johnson. En effet, le réalisateur de « Fruitvale Station » confronte le personnage légendaire de Rocky Balboa à un nouveau combat inédit. La mise en parallèle de ces deux combats accentue le lien de filiation naturel entre les deux protagonistes, qui se traduit à l’écran par un parfait mélange entre des moments intimistes boulversants et des scènes d’entraînements et de combats diablement efficaces et immersives. Les quelques facilités narratives et passages obligés maladroits du scénario, coécrit par Ryan Coogler et Aaron Covington, sont compensés par la sincerité et l’amour que le réalisateur porte au projet.
« Creed » parvient ainsi à réunir tous les ingrédients majeurs qui ont fait le succès de « Rocky » : des personnages « vrais » et attachants, une histoire d’amour crédible et surtout un combat existentiel universel. Le film de Coogler se démarque également par la maîtrise de sa mise en scène qui s’illustre notamment au travers de plans séquences hallucinants lors des scènes de combats de boxe. Mais la plus grande réussite du film reste indéniablement Rocky Balboa, servi par des dialogues criant de justesse et surtout par l’exceptionnelle prestation de Sylvester Stallone, qui vient d’être récompensée à sa juste mesure par le Golden Globes du Meilleur acteur secondaire. Comment ne pas être touché et ému par ce protagoniste simple mais jamais simpliste qui, au fil de chaque opus de sa saga, s’est naturellement imposé comme l’un des personnages les plus touchants et les plus beaux du 7ème art.
Comme son titre l’indique parfaitement, le second film de Ryan Coogler s’impose comme l’héritage de « Rocky » : un chef d’oeuvre du cinéma populaire. Sorte de version parfaitement réussie de « Rocky 5 », « Creed : L’Héritage de Rocky Balboa » est un uppercut touchant aux tripes et au cœur qui débouche sur un véritable KO cinématographique.
CREED (Rocky 7) – Trailer VO par TheDailyMovies
Creed : L’Héritage de Rocky Balboa
De Ryan Coogler
Avec Michael B. Jordan, Sylvester Stallone, Graham McTavish
Warner Bros.
Sortie le 13.01