Quand les sorties en salle ne vous suffisent plus (par goût ou parce que vous avez déjà tout vu, même le film moldo-valaque sur la vie d’un berger transsexuel), la Cinémathèque est là pour vous combler d’une offre alternative aussi éclectique que touffue !
Un programme de fou pour ces mois de mai et juin à la Cinémathèque suisse, sise, rappelons-le, au Casino de Montbenon et parfois au cinéma Capitole pour les grandes séances. Il y a tellement de choses que nous n’aurons probablement pas l’espace de tout traiter mais on va faire au mieux (et si j’arrêtais les digressions oiseuses, ça aiderait aussi).
Tout d’abord, et ce n’est à manquer sous aucun prétexte, deux magnifiques rétrospectives vous sont offertes.
La première revient sur le Pape du film noir à la française, celui qui donna ses lettres de noblesse au cinéma de genre pendant la Nouvelle Vague, j’ai nommé Jean-Pierre Melville. L’homme au stetson et aux lunettes noires, qui admirait la puissance des polars américains de Walsh, Mann et Huston, aura su utiliser cette passion pour tourner plusieurs chefs d’œuvre du polar à la française, immédiatement reconnaissables. Son style dépouillé – poussé jusqu’à l’épure dans « Le Samouraï » –, ses personnages solitaires luttant pour tenir leur parole dans un monde cruel, les relations d’amitié virile, constituent une marque de fabrique inégalable. La rétrospective permet de parcourir le meilleur d’une filmographie relativement courte (13 long-métrages au total), mais riche en grands films, en vous permettant de (re)découvrir : « Léon Morin, prêtre » ; « Le Doulos » (que votre serviteur vous avait pointé dans notre rubrique « Il faut l’avoir vu » du n°4 de Daily Movies) ; l’excellent « Le Deuxième souffle » ; le chef d’œuvre « Le Samouraï » (qui inspira fortement « The Killer » de John Woo et « Ghost Dog » de Jim Jarmusch) ; le tragique « L’armée des ombres » ; « Le Cercle rouge » qui réunit Alain Delon et Bourvil (ce dernier dans un rôle à contre-emploi en policier froid et calculateur), et enfin « Un flic », film testament qui ne rencontra malheureusement pas le public et conclut la carrière du réalisateur.
La seconde se consacre au chef de file de ce qui fut appelé la Nouvelle Vague taïwanaise, Hou Hsiao-hsien. Il sut renouveler le cinéma chinois dans les années 80 en imposant un style allant à l’essentiel, abordant frontalement des préoccupations contemporaines, tout en proposant de très belles ambiances grâce à la photo de Christopher Doyle (qui deviendra célèbre au travers de sa collaboration avec Wong Kar-wai). Quatorze films vous seront proposés, montrant l’évolution du cinéaste, de « Un temps pour vivre, un temps pour mourir », à « Le Voyage du ballon rouge », en passant par son film probablement le plus connu, « Millenium Mambo », et son premier grand succès public « La Cité des douleurs », qui initia sa trilogie sur la mémoire de son pays.
Autre évènement marquant, l’avant-première de « La Sapienza », film presque suisse d’Eugène Green. Presque suisse car, même s’il s’agit d’une coproduction franco-italienne, elle s’intéresse, à travers la fiction, au maître tessinois de l’architecture baroque, Francesco Borromini.
Et comme si tout cela n’était pas suffisant, vous pourrez découvrir lors d’une soirée spéciale le réalisateur insolite Guy Brunet, savourer une rétrospective consacrée au cinéma minimaliste américain, ou la Carte Blanche donnée à Rui Nogueira (ancien directeur du CAC-Voltaire), etc.
Bref, si un soir vous ne savez pas trop quoi faire, la Cinémathèque est là pour vous !