Nous suivons le quotidien de deux retraités cubains qui peinent à joindre les deux bouts, dans un pays où presque tout s’achète au marché noir…
C’est toujours un plaisir de voir un film cubain. La musique est entraînante, les personnages sont attachants et leurs histoires sortent de l’ordinaire. Cette fois-ci, les deux héros sont des retraités. Victor Hugo et Candelaria vivent dans un quartier calme d’une localité assez éloignée de la capitale, La Havane. Cette femme svelte, bien conservée pour son âge, travaille comme blanchisseuse dans un grand hôtel la journée et chante dans un petit club local la nuit.
Son mari s’occupe de la maison. Lorsqu’il a du temps libre, il trouve des combines pour arrondir les fins de mois difficiles. Sa spécialité, ce sont les cigares. Ce vieil homme noir à la barbe blanche, profite de son âge avancé et de sa santé parfois défaillante pour passer en douce des boites volées ou achetées à moindre prix qu’il revend par la suite au marché noir.
Ces bénéfices cumulés permettent au couple de vivoter dans un pays où toute denrée même anodine se fait rare. Même l’eau et l’électricité ne sont pas assurés au quotidien. C’est dans la pénombre que l’on entrevoit leurs sourires illuminer leurs visages marqués. Oui, les temps sont durs, mais le couple est heureux et reste positif, même dans l’adversité.
Leur quotidien se répète inlassablement, jusqu’au jour où, Candelaria, rapporte au domicile, une sacoche mystérieuse qu’elle a trouvé dans un bac à linge sale. Son contenu est une caméra qu’un touriste s’est fait voler le jour même, lors du nettoyage de sa chambre d’hôtel. Nos deux héros se demandent s’ils doivent garder ou non, ce cadeau tombé du ciel. Finalement, ils décident de conserver le précieux appareil puis commencent à l’utiliser.
Leur vie, autrefois, monotone devient, dès lors, plus intéressante et excitante. Ils se filment dans toutes les situations et retrouvent par la même occasion leurs désirs sexuels disparus. Cet appareil les rajeunit et tous les soucis sont oubliés. Malheureusement, la caméra est à nouveau volée et son contenu dévoilé…
Avec « Candelaria », le réalisateur colombien, Jhonny Hendrix Hinestroza, souhaitait évoquer sa peur de prendre de l’âge et de voir vieillir ses parents. Ce sont ces sentiments naturels que le cinéaste à voulu nous décrire. Pour ce faire, il a pris comme contexte, un moment clé de l’histoire cubaine de la fin des années 80 et du début des années 90. Celui de la chute de l’Union soviétique. Il nous montre dans son film que Cuba a continué à vivre comme avant, sans trop s’adapter aux changements qui lui étaient imposés.
Les dirigeants de l’île se sont malgré tout, rapidement ouverts au tourisme pour voir si le pays pourrait en vivre, et cela a eu comme effet pervers de créer un tourisme parallèle : le tourisme sexuel. L’économie s’est malheureusement beaucoup développée autour de ce nouveau commerce et les vieux n’ont eu d’autres choix que de compter sur les rentrées d’argent de leurs enfants. Ce sujet choquant est brièvement mentionné dans le film, mais ne fait l’objet d’aucune image ni de commentaires dérangeants.
Le Cinéaste âgé de 42 ans, à qui l’on doit quelques rares créations : « Anina », « Choco » et « Hiroshima », revient sur les raisons qui l’on poussé à réaliser son dernier long-métrage. Un jour en se promenant à La Havane, le réalisateur à rencontré une vieille dame qui portait le nom de « Candelaria ». Cette femme aux yeux sombres et à la peau brûlée lui a raconté sa vie avec sa voix rauque mais mélodieuse. Cette émouvante histoire, lui a rappelé des souvenirs de sa propre enfance en Colombie. L’envie lui est alors venue, de porter cette histoire à l’écran, non pas pour dénoncer des agissements, mais plutôt pour honorer les personnes qui ont souffert en silence.
La 14e édition des Journées des Auteurs de la 74e «Mostra de Venise» s’est conclue sur une explosion d’émotion autour de la victoire de ce film simple, mais particulier, qui a remporté le premier prix de la section autonome, le «GdA Director’s Award». Une récompense bien méritée.
Candelaria
COL – 2016 – 88 Min. – Drama
Réalisateur: Jhonny Hendrix Hinestroza
Acteur: Alden Knight, Veronica Lynn, Manuel Viveros, Philipp Hochmair
DCM
16.05.2018 au cinéma