Les aficionados de nos pages nanar se souviendront sûrement de celui qu’on peut considérer comme un maître du nanar (ou un prince du cinéma bis, ça dépend des points de vue) : l’illustre Bruno Mattei. Papa de ces aberrations que sont « Virus Cannibale », « Les Rats de Manhattan » ou encore « Robowar », ce monteur de génie, capable de transformer n’importe quelle soupe de pellicules en film à peu près cohérent, y ajoutait une qualité très prisée de l’industrie cinématographique transalpine agonisante : un sens de la débrouille qui lui permettait de boucler des films avec le budget sandwich d’une production hollywoodienne.
David Didelot, spécialiste émérite du cinéma bis, s’attaque au chantier de titan qu’est le retraçage de la carrière prolifique du roublard Romain. Partagé entre un respect envers les qualités de technicien de l’homme et l’évidence de son côté plagieur assumé, l’auteur balance tout au long des 444 pages entre défense du personnage (tançant même ceux qui le considèrent comme un faiseur de nanars) et déballage sans fard de la joyeuse malhonnêteté de ses productions qui copiaient sans vergogne les succès de leurs temps (de « Mad Max » à « Aliens », en passant par « Predator »). Mattei n’était pas différent de ses contemporains, honnêtes artisans qui tentaient de faire survivre le cinéma italien face à l’ogre américain, et aura touché à tous les genres : péplum, western, nunsploitation, film de zombies, gestaporn, mondos, sous-rambos, érotisme soft, voire quelques rares films sérieux. Sa « touche » : l’utilisation compulsive de stock-shots qu’il garda de ses premières années comme monteur de documentaires, et un sens consommé de l’excès et de l’absurde, qui offre des moments absolument WTF à la plupart de ses films.
Voici donc un superbe ouvrage à la riche iconographie, enrichi de quelques interviews de ses collaborateurs, qui offre un regard exhaustif de l’œuvre du réalisateur fou. Un voyage réjouissant dans une cinématographie improbable.
Bruno Mattei – Itinéraires Bis
De David Didelot
Artus Films
Faudrait vraiment que je le lise celui là, je suis en pleine redexouverte de ses chefs-d’oeuvres 🙂