Ce remake pauvre en émotion mais riche en effets spéciaux tente de nous faire découvrir sous un nouveau jour ce classique absolu du cinéma. Un pari très audacieux et largement raté.
En 1959, un Germano-Suisse, William Wyler, réalise l’un des plus grands chefs-d’œuvre cinématographiques américains, projeté pour la première fois le 18 novembre de la même année à New York. Adapté du roman « Ben Hur, A Tale Of The Christ » de Lewis Wallace paru en 1880, ce péplum dont l’action se situe au premier siècle est l’un des films les plus primés de Hollywood avec onze Oscars. Il est resté dans les mémoires pour ses séquences exceptionnelles telles que la célèbre course de chars, la crucifixion du Christ et la bataille navale contre les Macédoniens.
Cette année, la Metro Goldwyn Mayer et les studios Paramount ont décidé de dépoussiérer un peu ce monument du cinéma et d’y ajouter quelques effets spéciaux. Entre autres, la 3D censée améliorer le plaisir des cinéphiles.
Orphelin, un jeune Romain du nom de Messala est adopté par une famille princière de Judée. Il grandit aux côtés de Ben-Hur, un adolescent du même âge avec qui il partage sa passion des courses équestres. Lors d’une sortie à cheval, celui-ci sauve la vie de son frère et ami, Judah. Quelques années plus tard, notre jeune Romain part se battre à l’étranger comme légionnaire. Il remporte de nombreuses victoires et revient sur ses terres d’origine qu’il a la charge d’administrer. Mal reçu par une partie de la population locale, il décide de mater la rébellion et de tuer les agitateurs. Judas refuse de participer à ces violences et se retrouve, lui aussi, accusé de complot. Condamné à l’exil et esclave sur une galère romaine, il arrive malgré tout à s’en sortir vivant. Sa seule obsession sera alors la vengeance…
Timur Bekmambetov a eu la lourde tâche de produire ce nouveau remake. Le réalisateur russo-kazakh de 55 ans est assez méconnu sous nos latitudes, mais les cinéphiles connaissent son style pompier et excessif, qu’il a su déployer dans des films aussi délirants que « Night Watch », « Abraham Lincoln contre les Vampires » (indispensable nanar !), « Apollo 18 » et « The Darkest Hour ». Un choix bien étonnant pour adapter un péplum académique, mais qui s’explique dès que l’on voit le film : il s’agit d’en mettre plein la vue, de forcer sur le grand spectacle, tout en oubliant soigneusement l’importance de construire des personnages attachants et charismatiques.
Son nouveau long-métrage est la sixième copie du célèbre péplum et donc l’une des plus décevantes. Le scepticisme ressenti par la critique lors de sa sortie outre-Atlantique confirme cette impression. Peu précis, très romancé et pas très fiable au niveau historique, cette réalisation n’a de positif que sa modernité. La course de chars est assez impressionnante en 3D mais le film dans son ensemble ne transmet aucune émotion.
Les acteurs principaux ne crèvent pas l’écran. Jack Huston (qui est le petit-fils du réalisateur américain John Huston), n’est pas le Ben-Hur attendu. Toby Kebbell (Messala) qui lui donne la réplique n’est pas meilleur que lui. Seul Morgan Freeman (qui a certainement été engagé pour rehausser le niveau du film) sort du lot, malgré une infâme coiffure dreadlocks qui le fait plus ressembler à l’aïeul de Bob Marley qu’à un propriétaire africain de quadrige.
Principale curiosité du spectateur connaissant l’original, la course de chars mortelle qui oppose Ben-Hur à Messala a été tournée en 32 jours dans les studios de Cinecittà à Rome. Les acteurs ont suivi un entraînement intensif de douze semaines pour cette compétition. Dans le but de donner encore plus de réalisme à cette chevauchée, une caméra sportive 4G a été utilisée : il s’agit d’une des dernières trouvailles technologiques pour mettre en valeur ce genre de scènes. Grâce à ce procédé, le spectateur est totalement immergé au cœur de l’action. Certaines prises de vue dangereuses ont été réalisées en infographie pour préserver la sécurité des montures et des équipes de cascadeurs. Des chevaux numériques ont été conçus pour mettre en image les chutes violentes.
Produite pour un budget de 100 millions de dollars, cette superproduction n’a jusqu’à présent pas obtenu les résultats escomptés. Les maisons de production en manque d’idées novatrices ont certainement surestimé l’intérêt du public pour cette nouvelle réadaptation historique d’un classique qu’il aurait mieux fallu laisser tranquille.
Ben Hur 3D
De Timur Bekmambetov
Avec Jack Huston, Morgan Freeman, Toby Kebbell, Rodrigo Santoro, Nazanin Boniadi, Pilou Asbaek
Universal Pictures
Sortie le 07/09