Pour vous faire vivre le Festival de Cannes comme si vous y étiez, relater des films de la compétition et de la sélection « Un Certain Regard », et vous livrer des entretiens exclusifs, Daily Movies débarque pour la première fois sur la croisette. Tout comme son rédacteur.
Depuis mon plus jeune âge, la croisette de Cannes me fait de l’œil. Peut-être le strass, les paillettes, les flashs ou les défilés des plus grandes stars du cinéma. Peut-être aussi la programmation toujours plus riche et intrigante du plus grand des festivals de films qui fête cette année sa 69ème édition. Certainement, la curiosité que suscitaient en moi ces films, dont les réalisateurs venus du monde entier m’étaient alors inconnus, et les débats qu’ils provoquaient au sein de la critique internationale. Un peu d’appréhension, mais surtout de l’excitation lorsque je découvre une ville transformée, dont l’organisation est désormais uniquement dictée par le bon fonctionnement d’un événement d’une telle ampleur. Une bulle, un monde à part en quelque sorte, où se côtoient déjà quelques centaines de journalistes venus des quatre coins du globe à mon arrivée matinale la veille des festivités, où les dernières pièces du tapis rouge sont encore en train d’être posées. On se sent tout petit, mais pas encore étouffé.
Mercredi 11 mai – 10h00. Première projection cannoise réservée aux journalistes avec le dernier film de Woody Allen, Café Society, présenté Hors-Compétition et comme film d’ouverture le soir même. Arrivé une demi-heure seulement avant la séance, une file d’attente digne de ce nom m’attend. Les badges presses étant hiérarchisés en fonction de la popularité du média et de l’ancienneté du journaliste, je vois donc défiler ceux de la plus haute importance avant que mon tour n’arrive enfin. On est à cinq minutes du début de la séance, plusieurs escaliers m’attendent avant de rejoindre l’extrême droite du balcon de la salle Debussy, avec son torticolis en prime pour réussir à voir l’écran. Peu importe, l’émotion y est trop grande pour se plaindre. J’y suis. Mon premier film à Cannes.
Allen semble séduire la critique avec un nouveau film lui appartenant pleinement. Tellement qu’on ne peut douter une seule seconde de l’identité de son auteur. Avec un casting impeccable, des dialogues sarcastiques et une lumière sublime, Café Society rend hommage à l’Amérique des années 30 dans une romance acerbe, touchante et décalée, dont les complications comiques découlent d’un scénario raffiné. Le réalisateur excelle même si l’auteur ne sort pas de ses sentiers battus. Ce qui n’est pas le cas de ses actrices et acteurs, merveilleusement dirigés. Jesse Eisenberg campe avec retenue Bobby Dorfman, jeune candide romantique plus attiré par la beauté vampirisante de Vonnie (Kristen Stewart) que la boite de production hollywoodienne de son oncle Phil (Steve Carell), avec qui la jeune femme vit déjà une relation secrète. Une comédie romantique à la mise en scène étincelante, seyant comme un gant à l’ouverture des festivités.
Après la conférence de presse de l’équipe du film attirant son lot impressionnant d’intéressés, place au Jury de la compétition cannoise, présidé par le réalisateur australien George Miller. « Le plus important lorsque l’on fait partie d’un tel jury, n’est pas tant dans les choix finaux que nous ferons, mais plutôt dans l’échange, et les discussions que les films provoqueront. », annonce le président. Une affirmation qu’approuvent visiblement ses collègues réalisateurs, acteurs et producteurs. « Je ne suis pas venu ici principalement pour juger, mais pour partager », acquiesce le réalisateur français Arnaud Desplechin. « Même si l’on se réjouit de la découverte, on redoute aussi beaucoup nos choix et leurs implications », ajoute la chanteuse et actrice Vanessa Paradis. Après un tour de table sur les premières impressions du nouveau jury, place aux questions des journalistes auxquelles certaines se prêtent volontiers : « S’il n’y avait pas le Festival de Cannes, un certain type de cinéma ne serait pas reconnu et n’aurait pas de visibilité ou de reconnaissance. On serait cantonné aux blockbusters », plaisante Kirsten Dunst, actrice américaine découverte par la trilogie Spider-Man de Sam Raimi au début des années 2000, et récompensée à Cannes en 2011 pour son interprétation dans Melancholia de Lars Von Trier. D’autres en revanche semblent ne pas vouloir entendre parler des journalistes et préfèrent rester dans leur rôle d’acteur. Les quelques courageux qui se seront risqué à poser une question à Donald Sutherland n’auront obtenu qu’un « Il fait vraiment froid ici », amusant beaucoup la galerie ceci-dit.
Il ne reste plus qu’à savoir si la pluie aura raison des brushings de la montée des marches pour la cérémonie d’ouverture en début de soirée, avant de débuter la compétition officielle demain en début de matinée au Grand Théatre Lumière.