Un huis-clos intense qui pose l’éternelle question morale du combattant : la fin justifie-t-elle les moyens ?
Le réalisateur/producteur genevois Romed Wyder s’était fait rare depuis son thriller psychologique « Absolut » en 2004. Il est de retour aux commandes de ce huis-clos intense, suite à sa découverte du roman « L’Aube » (« Dawn ») d’Elie Wiesel. De cette adaptation découle un film psychologiquement riche, qui n’est pas sans rappeler, toutes proportions gardées, « L’Armée des ombres » de Melville. En effet, on y retrouve ces résistants confinés dans un univers ascétique et gris, qui se retrouvent à combattre côte à côte malgré leurs différences de caractères (ils n’auraient probablement pas été amis dans la « vraie » vie), et qui sont chaque jour confrontés à des choix moraux compliqués.
Nous sommes en 1947 : la Palestine est sous mandat britannique. Les sionistes se battent pour la création d’un Etat juif en Palestine et un de leurs membres vient d’être condamné à mort par les Anglais. En représailles, la résistance a kidnappé un officier britannique qu’ils essaient d’échanger contre leur ami. Cinq insurgés passent la nuit ensemble, en attendant les résultats de la négociation. Si, à l’aube, les Britanniques pendent leur ami, le plus jeune d’entre eux, Elisha, rescapé des camps de la mort, devra exécuter l’otage. Sauf qu’au début de la nuit il ne le sait pas encore, et que ses quatre compagnons d’armes vont s’employer, chacun à leur manière, afin qu’il surmonte ses conflits de conscience et s’engage pleinement dans la lutte armée. Il y a Gad, le charismatique et paternel chef de groupe, Joav l’ancien truand brutal et agaçant, Gideon, le juif pratiquant, toujours calme et qui tempère Joav, et enfin Ilana, la recruteuse, jouant à la fois la figure maternelle et amoureuse.
Il n’est pas facile de réaliser un huis-clos – ce genre peut vite conduire à l’ennui – mais Romed Wyder a su ménager un rythme satisfaisant, grâce à de bons dialogues et à l’insertion judicieuse de quelques flash-backs. De plus, les acteurs jouent chacun très juste et donnent une épaisseur à leurs personnages, le pivot restant Elisha (très bon Joel Basman, que nous avions remarqué dans « Luftbusiness », chroniqué dans le Daily Movies n°2), dont les questionnements résonnent avec ceux du spectateur : l’ancienne victime doit-elle devenir bourreau ? On ne peut s’empêcher de faire le parallèle avec la situation actuelle des « terroristes » palestiniens…
DAWN
De Romed Wyder
Avec Joel Basman, Sarah Adler, Liron Levo, Jason Isaacs
Aardvark Film
Sortie le 29/04