Un des plus grands succès du cinéma suisse avec 940’145 entrées, « Les Faiseurs de Suisses » est une comédie grinçante de 1978 qui n’a – malheureusement – rien perdu ni de son actualité, ni de sa justesse politique.
Le réalisateur Rolf Lyssy citait volontiers la célèbre phrase d’un ancien chef de police comme note d’intention : « Nous estimons que l’assimilation d’un étranger est assurée à partir du moment où cette personne vit assez longtemps, chez nous, sans se faire remarquer. Voici quelque qualité dont doit faire preuve un étranger vivant dans notre pays avant de devenir un véritable citoyen suisse : neutre, intègre, solide, contentieux, honnête, intègre (déjà dit !), propre, simple, scrupuleux, etc. »
Max Bodmer et Moritz Fischer sont deux inspecteurs cantonaux chargés de juger les candidats à la naturalisation, le premier, vieux briscard dans la lignée du policier cité plus haut, le second, débutant plus ouvert sur le monde. Leurs enquêtes intrusives (visites surprises pour vérifier la tenue du logis, surveillance du compte en banque, etc.) offrent l’occasion de se moquer des stéréotypes sur la Suisse (pays le plus beau, le plus propre et le plus riche du monde !) : le test ultime étant… la dégustation d’une fondue maison ! Le pâtissier italien pâtira de son engagement syndical, la danseuse yougoslave de sa vie libre, et le couple apparemment le plus conforme aux critères suisses (un couple d’Allemands, devenus des Français dans la VF !) est finalement celui qui a les plus viles motivations. Bien que le film soit tourné comme un épisode de Derrick, son contenu critique, qui fait preuve d’une autodérision rare, en fait indéniablement un classique du cinéma suisse.
Les Faiseurs de Suisses
De Rolf Lyssy
Avec Walo Lüönd, Emil Steinberger, Beatrice Kessler
Frenetic/Praesens