Claire est en mal de vivre. Elle emménage dans un appartement meublé et envisage ses voisins comme des acteurs de sa réalité fantasmée et inventée de toute pièce. Elle scénarise et met en scène sa vie avec violence et harcèlement. Alain, un de ses voisins, pianiste désabusé, vit avec des TOC importants et se laisse peu à peu entraîner dans la spirale de Claire. Jacques, professeur de littérature, se fait également aspirer par cette folie. Jusqu’où leurs vies et leurs mélancolies vont emmener les protagonistes ?
Un film sombre par sa thématique de wagon de troubles et de dépressions en tous genres qui absorbe l’énergie du spectateur comme celle des personnages.
L’ambiance et les décors gris et tristes forcent le trait de cette torpeur d’émotions contradictoires qui ensevelit l’intrigue dans une mélasse sans fin. Quelle ampleur, quelle profondeur, quelle dimension peuvent prendre nos angoisses et nos idéaux ? Confrontés les uns aux autres, les histoires personnelles font plus de ravages qu’elles n’apportent de satisfactions. C’est un peu une fenêtre sur l’interprétation de nos craintes les plus inavouables que sont la solitude, le manque d’affection ou encore l’absence de contact humain.
Le personnage de Claire s’enferme dans ce qui pourrait sembler être une dynamique toxique de destruction avec la volonté d’entraîner les autres avec elle. En réalité, il s’agit plus de la manifestation de sa colère, de sa frustration et de son incompréhension face à une situation personnelle perturbante. Les personnes dites toxiques et les relations qu’elles créent ne sont-elles finalement pas issues d’un passé traumatisant et décevant ? Sans excuser leur comportement, la compréhension est peut-être une clé vers l’arrêt de la stigmatisation. Peut-on parler d’amour ou de crescendo de la haine ?
À savoir, si on choisi de plonger dans des relations problématiques comme celle-ci ou de rester en spectateur et vivre autre chose. Entre, violence et douceur, entre manque de communication et cris et finalement entre solitude et compagnie, Chroma aborde et dépeint les couleurs des sentiments contraires et malgré tout attractifs.
Côté technique, les prises de vue font penser à celle de Hitchcock avec son Fenêtre sur Cour, bien que les personnages entrent rapidement en contact pour vivre des relations tangibles. Le thème de la destruction personnelle ou en groupe fascine ceux qui ont la chance de l’ignorer et rassure ceux qui en souffrent. On peut même aller plus loin dans la réflexion que nous offre ce long-métrage en se rapportant à la nature même de notre existence de la naissance à la destruction inextricable que nous apporte la mort.
Un petit film pour un grand thème.
Chroma
CH-BE – 2021 – Drame – 90min
De Jean-Laurent Chautems
Avec Solène Rigot, Aurélien Caeyman, Patrick Chesnais, Lauriane Gilliéron, François Florey, Michel Cassagne…
Cineworx
06.07.2022 au cinéma