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vendredi, décembre 27, 2024
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Melvil Poupaud : « Il y a quelque chose de beau dans cette reconquête de la part des femmes, trop longtemps mises à l’écart »

Lauren von Beust
Lauren von Beust
Amoureux du film «American Gigolo», ses parents la prénomme en hommage à l'actrice américaine Lauren Hutton. Ainsi marquée dans le berceau, comment aurait-elle pu, en grandissant, rester indifférente au 7ème art ? S'enivrant des classiques comme des films d'auteur, cette inconditionnelle de Meryl Streep a prolongé sa culture en menant des études universitaires en théories et histoire du cinéma. Omniprésent dans sa vie, c'est encore et toujours le cinéma qui l'a guidée vers le journalisme, dont elle a fait son métier. Celle qui se rend dans les salles pour s'évader et prolonger ses rêves, ne passe pas un jour sans glisser une réplique de film dans les conversations. Une preuve indélébile de sa passion. Et à tous ceux qui n'épellent pas son prénom correctement ou qui le prononcent au masculin, la Vaudoise leur répond fièrement, non sans une pointe de revanche : «L-A-U-R-E-N, comme Lauren Bacall !». Ça fait classe !

Il devait venir présenter au public genevois « Les Jeunes Amants », en compagnie de sa partenaire à l’écran, Fanny Ardant. Mais le Covid l’en a empêché. Néanmoins bien remis depuis, l’acteur français Melvil Poupaud s’est confié par téléphone à sa sortie d’isolement. Il raconte les débuts parfois timides du tournage d’un film qui casse les codes.


Bonjour Melvil Poupaud ! Dans « Les Jeunes Amants », vous incarnez Pierre, un quadragénaire, médecin, marié et père de famille, qui tombe fou amoureux de Shauna, une femme de 70 ans. Comment décririez-vous leur relation ?
Mon personnage subit un coup de foudre, il est transformé par cette rencontre avec elle. Il s’embarque dans cette histoire, il n’y a pas de point de retour. Il prend beaucoup de risques, tandis que Shauna est, à la base, beaucoup plus sur la défensive, elle se demande si tout ça est bien raisonnable. Elle est méfiante parce qu’elle veut se préserver elle-même, mais lui aussi, alors que mon personnage s’emballe. C’est plus fort que lui. Et il l’embarque.

On peut dire Pierre a une sensibilité particulière ; c’est rare de voir un homme pleurer à l’écran ou un mari qui avoue son adultère à sa femme. C’est ce côté de personnage qui casse les codes qui vous a plu ?
À vrai dire, je ne m’en suis pas tellement rendu compte à la lecture du scénario. En général, quand je choisis un rôle, je ne pense pas à défendre une idée ou une cause. Là, j’étais davantage focalisé sur cette histoire d’amour et tout ce côte romantique. J’incarne un homme qui assure à tous les niveaux. Il est un bon père et un bon médecin. Et puis, il s’avère finalement plus complexe et plus fragile. Donc c’est vraiment après avoir vu le film et surtout grâce au retour des gens que j’ai compris qu’il avait une dimension presque militante. Il sort des clichés et défend une certaine idée de l’amour. Et puis au-delà de l’histoire, la perspective de tourner avec Fanny Ardant m’a beaucoup motivé. C’est une actrice que j’adore et je n’aurais jamais pensé, un jour, jouer son amoureux. C’est une chance.

« Fanny était plus stressée que moi, au début. Elle est très pudique, très réservée, je la sentais très fragile pour toutes les scènes intimes…»

Fanny Ardant, c’est un peu l’incarnation du cinéma français. La rencontre et le tournage ont-ils été intimidants pour vous ?
En fait, c’est elle qui était la plus intimidée. Elle était plus stressée que moi, au début. Elle est très pudique, très réservée, et pour toutes les scènes intimes ou de tendresse, je la sentais très fragile. Elle ne voulait d’ailleurs pas se dénuder, c’était une des conditions pour qu’elle accepte ce rôle. Elle n’a pas l’habitude de ça. Du coup, c’était à moi de prendre les devants et de la mettre à l’aise. Mais il faut dire qu’on s’est très bien entendus, dès les premiers jours de tournage. On a été tout de suite très complices. On a beaucoup échangé sur la musique et la littérature… Une vraie histoire d’amitié est née entre nous.

Le réalisateur Jean-Jacques Annaud prétend que tout le monde se tutoie dans le milieu du cinéma. Mais, malgré l’amitié que vous avez l’un pour l’autre, Fanny et vous continuez à vous vouvoyer. C’est une marque de respect ?
C’est parti comme ça et c’est resté, je ne sais pas pourquoi. Mais ça ajoute quelque chose d’exceptionnel à cette relation. Et puis vous savez, Fanny est quelqu’un de très original. Elle est toujours surprenante. Elle a un point de vue très à contre-courant, un côte assez rebelle. Ce n’est vraiment pas quelqu’un comme les autres. Elle a une fantaisie, une passion et une fougue qui sont vraiment intactes. Ce n’est pas du tout une dame résignée et rangée, au contraire, elle a vraiment gardé quelque chose de l’adolescence.

« La réalisatrice a voulu que je porte une barbe pour donner un côté plus baroudeur au personnage »

Vous en avez eu besoin aussi de ce côté adolescent pour interpréter le personnage de Pierre ?
En ce qui me concerne, je suis davantage tourné vers l’enfance. On en a d’ailleurs beaucoup discuté avec elle, qui a ce côté rebelle et contre les conventions. Moi, je suis plus nostalgique, plus doux, je crois. Et en Pierre, au contraire, j’ai vu ce mari rassurant et viril. D’ailleurs, la réalisatrice [Carine Tardieu] a voulu que je porte une barbe pour donner un côté plus baroudeur au personnage. Il fallait que je donne l’impression d’être blessé à l’intérieur, mais qu’à l’extérieur, je sois un mec viril et solide.

C’est toujours mal perçu de voir une femme sortir avec un homme plus jeune qu’elle, contrairement à l’inverse. En France, par exemple, le couple présidentiel contribue-t-il à faire bouger les lignes ou est-ce que l’on est encore loin du compte ?
Je pense que, oui, les choses sont en train de bouger à plein de niveaux. Je le vois avec ma fille de 19 ans, qui se préoccupe beaucoup des questions de genre, d’identité et de tolérance. Je crois que c’est une période où les gens affichent davantage leur singularité. Et il y a quelque chose de beau dans ce qu’il se passe actuellement, comme une sorte de reconquête de la part des femmes, trop longtemps mises à l’écart.

Les Jeunes amants
FR – 2020 – 1h52 min – Comédie, Drame
Réalisatrice: Carine Tardieu
Casting: Fanny Ardent, Melvil Poulpaud, Cécile de France, Manda Touré, Sharif Andoura
Filmcoopi
23.02.2022 au cinéma

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