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mardi, décembre 3, 2024
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Suot Tschêl Blau : Un village et ses secrets enfouis

Etienne Rey
Etienne Rey
Travailler pour une salle de cinéma, comme journaliste pour des médias ou organiser des événements pour le 7e art, ma vie a toujours été organisée autour de ma passion: le cinéma.

Ivo Zen fouille dans le passé récent d’un petit village des hauteurs grisonnes pour raconter les ravages qu’y a causé l’héroïne durant les années huitante et nonante.


Après un plan nocturne de montagne, le film commence par une séquence dans un café appelé « Croce Bianca » à Samedan en Engadine. Plusieurs gens s’attablent pour ce qui ressemble à une réunion d’anciens élèves. Un participant prend alors la parole, cite plein de prénoms qui évoquent plusieurs personnes mortes par accident, à cause de la drogue ou, dit-il, par désillusions. Un concert commence puis le titre s’affiche « Suot Tschêl Blau » au son d’une musique aussi planante que dissonante. Les plans de sommets enneigés et de cieux bleus s’enchaînent mais le spectateur a déjà compris que le documentaire n’allait pas parler que des splendeurs de la nature grisonne. 

En effet, même s’il est scandé par de superbes images, « Suot Tschêl Blau » (sous le ciel bleu en romanche donc) ne parle pas que de ça. Il raconte en fait une sorte d’épidémie de drogue qui s’est abattue sur les Grisons dans les années 80 et 90. Comme le raconte un protagoniste, la vague contestataire qui avait déferlée sur la Suisse (et ailleurs) autour de mai 68 est arrivée là-bas avec un temps de retard… et avec, l’héroïne. Beaucoup de jeunes y ont succombé et le grison Ivo Zen (peut-être ami de l’un d’eux) donne ici la parole à quelques parents, proches et survivants qui relatent leurs souvenirs, leurs peines et leurs combats. Surtout ils ne veulent pas, comme beaucoup dans la région apparemment, taire cette histoire et l’enfouir dans les non-dits et la neige. 

Ce très beau travail documentaire, habilement construit, riche en prises de parole poignantes et en leçons de sagesse, a donc valeur de témoignage et rend hommage aux victimes autant qu’il fait office de catharsis pour certains de ses protagonistes.

Voilà, « Suot Tschêl Blau » n’est pas un de ces films que l’on analyse ou que l’on dissèque outre mesure. Il parle au cœur et on ne peut qu’encourager le public à lui donner sa chance.

Under Blue Skies (Suot tschêl blau)
CH – 2020 – 72min – Documentaire
De Ivo Zen 
Outside The Box
17.11.2021 au cinéma

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