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jeudi, décembre 19, 2024
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La nuit Nanarland 2021 au Grand Rex à Paris

Yamine Guettari
Yamine Guettari
se promène souvent dans les bois avec un tronc d'arbre sur l'épaule. Aime respirer l'odeur du napalm au petit matin. Et quand il tire, il raconte pas sa vie !

Petit topo d’un des évènements cinématographiques de l’année (Cannes à côté c’est du pipi de chat) : la nuit Nanarland 2021 au Grand Rex à Paris.


Une nuit de folie : de 20h à 7h du matin, 4 films, entrecoupées de cuts du meilleur du nanar et de bandes-annonces sélectionnées pour leur côté… décalé, plus les fameux quiz. En plus on fêtait les 20 ans du site dans une ambiance festive du meilleur effet (2800 cinglés en étaient).

La programmation était de choix bien qu’elle ne réservait pas de surprise aux connaisseurs. On a commencé avec un thriller érotique bien barré et bien eighties d’Andy Sidaris, roi du plan nichon très généreux et de l’action débile, Piège mortel à Hawaii (1987). Il y décline sa recette phare : des bellâtres musculeux, des playmates sorties des pages centrales de Playboy offrant moult plans nichons tous plus gratuits les uns que les autres, de l’action un peu molle, de l’humour bon enfant et les paysages idylliques d’Hawaii. Le tout rehaussé par la patte Sidaris, qui a toujours quelques trouvailles improbables pour relever la sauce : ici un boa venimeux, une poupée gonflable qui connaîtra une mort particulière, et un frisbee d’un genre nouveau.

En numéro deux une perle, une rareté, enfin projetée sur grand écran en pelloche (qui a souffert) et sous-titrée. En Büyük Yumruk, un film d’action turc de 1983 par le duo prolifique Çetin Inanç (le Tony Scott de l’Hellespont) / Cüneyt Arkin (le Alain Delon du Bosphore), les stars qui nous ont offerts Turkish Star Wars quand même ! 1h16 de bastons quasi non-stop montée à la scie-sauteuse sur une intrigue famélique parsemée d’un sexisme bon enfant et de pinups turques. La touche locale ? Tout ce qui est cher est piqué à un autre film sous forme de stock-shots. Une poursuite en voiture ? L’Aston Martin de James Bond dans Goldfinger apparaît. Des fusillades ? Le Cercle Noir de Michael Winner (avec Charles Bronson) vient à la rescousse. Un corps en flamme tombant d’un balcon ? Merci Chi l’Ha Vista Morire d’Aldo Lado. Un braquage de supérette ? Vite un poliziesco avec Roma violente. Idem pour les musiques, allègrement piochées dans Opération Tonnerre ou Mon nom est personne. Quoi le copyright ?

Un spectacle court mais éprouvant, hystérique, hyper cutté, qui rongera les neurones du cinéphile le plus aguerri.

En troisième position, la plus dure car c’est le film de 3 heures du matin, celui où la salle risque de s’endormir, l’incroyable « mondo » Suède, enfer et et paradis (1968). Un mondo c’est un documentaire d’exploitation. « Il s’agit par définition de montages d’images d’actualités ou d’archives réunies par un thème commun, généralement racoleur, proposant aux spectateurs d’assouvir leur voyeurisme en matière d’exotisme, de bizarreries, de sexe et de violence. » (merci le glossaire de Nanarland). Ca coûte pas cher à faire et ça peut rapporter gros. Ici un producteur et un réalisateur italiens peu scrupuleux s’associent pour monter des séquences de documentaires sur la Suède et d’autres visiblement tournées pour l’occasion, et de les recouvrir d’un commentaire réactionnaire et d’une mauvaise foi crasse, qui va chercher dans les images les plus innocentes le stupre et la perversion inhérents aux Suédois. La déontologie documentaire est noyée en rigolant. Bonus : la VF est contée par un Jean Topart (le narrateur de Rémi sans famille ou Les cités d’or les boomers !) qui y met tout son talent de diction et d’intonation pour un résultat délicieux, où affleurent constamment l’ironie acide et le mépris.

Au final, ce merveilleux fauxcumentaire en dit plus sur l’Italie pieuse et conservatrice de la fin des années 60 que sur la Suède progressiste. Le commentaire s’offusque des préservatifs en vente libre, des mœurs libérées des hommes et des femmes suédoises, qui noient leur froideur et leur vacuité dans le sexe, de cet insupportable moralisme qui fait que les gens qui conduisent bourrés sont contrôlés et reçoivent des AMENDES (même le 1er ministre !), des cours d’éducation sexuelle pour les ados, du droit à la contraception et à l’avortement, etc.

Et pour finir, un film conçu pour réveiller un public éprouvé, le rambosploitation Strike Commando (1987) de l’orfèvre italien Bruno Mattei qui transforme tout ce qu’il touche en nanar de la plus belle eau. En rôle titre, l’inexpressif Reb Brown, qui joue Ransom (aucun rapport), un soldat US bien décidé à regagner la guerre du Vietnam. Une orgie d’action décomplexée qui confine au dadaïsme, Ransom traversant les rizières et les villages en beuglant continuellement tout en défouraillant à tout-va. C’est d’une connerie tellement abyssale qu’on prend un immense plaisir à suivre notre héros, qui enchaîne les punchlines involontaires et les coups stratégiques foireux.

A 7h du matin, épuisés mais heureux, nous débriefons la soirée, puis chacun retourne à ses pénates dans la grisaille parisienne en attendant de pied ferme l’édition 2022 !

Note : PROMIZOULIN/5.

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