Cette co-production France-Suisse-Luxembourg, relate l’histoire de « Mussarat », « d’Atiq », de « Mohsen » et de « Zunaira » durant l’été 1998, une longue période où les talibans occupèrent Kaboul. Le 1er couple susmentionné est marié depuis longtemps et ne se parle presque plus, notamment à cause d’une grave maladie. Le second couple, plus jeune, croit encore en un futur meilleur. Leurs destins se croiseront de manière brutale, violente même. Car Mohsen » va commettre un geste insoupçonnable et insensé qui les liera toutes et tous.
Adapté du roman de Yasmina Khadra (de son vrai nom Mohammed Moulessehoul), la bouleversante et dramatique réalisation de Zabou Breitman et Eléa Gobbé-Mévellec, démontre à quel point l’extrémisme religieux peut changer un pays, sa culture et ses mœurs à jamais. Déconcertante et humaine, cette animation ne laissera personne indifférent, mais choquera certainement également.
D’autres sujets tragiques sont abordés au sein du récit, à l’exemple de la place tronquée de la femme à Kaboul durant ladite période. Mais qui de mieux pour en parler que les coréalisatrices que nous avons eu le plaisir de rencontrer lors de leur passage au Festival d’Annecy.
Pouvez-vous nous présenter votre nouveau projet « Les Hirondelles de Kaboul » ?
Zabou : Il s’agit d’une histoire tirée d’un livre de Yasmina Khadra. Un roman qui se situe à Kaboul en 1998 au moment où les talibans viennent d’arriver. C’est l’histoire de ce gardien de prison Atiq qui travaille plus ou moins dans la prison des femmes et qui va rencontrer une jeune femme qui a eu une altercation avec son mari et dont il va tomber amoureux.
Vous aviez présenté « Les Hirondelles de Kaboul » dans un Work in Progress au Festival d’Annecy, comment s’est passé cette rencontre avec le public ?
Eléa : Il est très agréable d’être à Annecy parce que c’est un public de gens qui font la même chose que nous. On sent qu’il y a quelque chose de l’ordre de l’émulation où on se comprend et il y a l’envie qui circule en fait…
Comment est né le projet et pourquoi avoir choisi l’animation ?
Zabou : Alors, ce sont deux producteurs qui sont venus vers moi avec un scénario déjà adapté du roman pour en faire un film traditionnel. Puis, finalement, ils ont décidé d’en faire un film d’animation. Ils m’ont parlé et ils étaient déjà en train de parler avec « Les Armateurs » qui étaient très intéressés et j’ai donné mon accord pour ce projet. Ensuite, on a dû chercher une graphiste pour coréaliser ce film et c’est Eléa Gobbé-Mévellec qui devint une évidence.
Eléa : Parce que c’était la meilleur façon pour nous de raconter ça. Parce que c’était d’abord une histoire basée sur un ressenti et par rapport à la distance que ça mettait sur cette histoire-là. C’était ça qui était important pour nous, de ne pas prétendre à quelque chose, de raconter avec des images filmées, la justesse pour nous venait de l’éloignement en se distançant du réel avec un autre regard. On a cultivé une sorte de minimalisme pur pour ne parler que des choses qui étaient importantes pour nous, celles qui font ressentir des choses et le graphisme a été pensé un peu comme ça, en allant à l’essentiel et c’est comme ça que je me suis appropriée l’histoire.
Pourquoi ne pas avoir choisi des comédiens en doublage pour « Les Hirondelles de Kaboul » ?
Zabou : En tant que spectatrice, je trouve que la plupart des films sont mal joués. Les films d’animation français sont très mal joués. Même si parfois certains font exception, ça pourrait être beaucoup mieux. Je trouve qu’on s’en contente et que ça peut être mieux. C’est l’une des raisons qui m’ont poussée à prendre de très bons acteurs et de les faire jouer. C’est-à-dire, apprendre leur textes dans un espace qui leur permet de bouger et d’avoir un corps et quand ils ont un élan, ils ont un élan, et donc ça se passe différemment, c’est même exactement le contraire: ceux qui dessinent vont aller les regarder, ils vont entrer en lien avec eux et c’est dans les deux sens.
Eléa : C’est vrai que le fait qu’ils jouent bien, qu’ils incarnent bien, pour l’animateur c’est génial parce qu’il peut s’éclater, en fait, en faire moins avec le dessin parce que le truc existe déjà en dessous et c’est super. Et puis, en plus extraire juste les petits micromouvements qui suffiront à faire exister et mettre en relief un personnage dans une animation la plus épurée possible, faire que ça va devenir hyper vivant, hyper juste… c’est hyper gratifiant je trouve.
Êtes-vous fières d’une séquence en particulier ?
Eléa: il y en a plein parce qu’elles sont toutes très différentes. À chaque fois il y a des choses qui vont arriver. Des fois ce sera l’animation qui va révéler super bien une chose ou autre et d’autres séquences qui sont géniales parce que elles sont rayonnantes de vie.
Zabou : c’est exactement ce que tu dis, parfois c’était parce que les acteurs ont fait quelque chose de tellement drôle, tellement beau, tellement senti… parfois parce que l’animateur qui était là a tellement senti le mouvement qu’il a mis plus de sensibilité… c’est le tout qu’il fait quelque chose et qui est émouvant.
Qu’est-ce que vous espèrerez comme impact au moment de la sortie du film dans les salles de cinéma ?
Zabou : J’aimerai que les gens pleurent. Vous savez quand on pleure pour un film, on pleure pour l’humanité, comme quand on pleure pour une musique, j’aimerai que les gens sortent avec un cœur énorme.
Eléa: Qu’ils soient habités comme nous avons été habités à le faire. Et qu’on ait réussi à faire passer tout ce qui nous a traversés pour cette création.
Les hirondelles de Kaboul
FR – 2019 – 80min
Animation
Réalisateur: Zabou Breitman, Eléa Gobbé-Mévellec
Acteur: Hiam Abbass, Simon Abkarian, Swann Arlaud, Zita Hanrot
Filmcoopi
18.09.2019 au cinéma