Contrairement à ce qu’il est bien de penser, le cinéma des Dardenne verse parfois dans l’artificialité. Pavé de très nobles intentions, difficilement attaquables, leur cinéma-vérité, comme beaucoup l’appelle, sonne parfois faux.
Jérémie Renier, dans le rôle d’un marginal décadré pour « L’Enfant », était peu crédible. Quant au dealer qu’il mette en scène dans le « Gamin Au Vélo », n’importe quel consommateur sensé se refuserait d’acheter auprès de lui. Ce film-ci laissait justement craindre comme un excès d’artificialité. Le concept même, qui voit une femme contrainte de contacter un maximum de collègues en un minimum de temps pour les convaincre de voter contre son renvoi, aurait vite pu rendre le récit un peu répétitif et mécanique. La présence d’une superstar dans le rôle principal, française de surcroît, aurait pu ne pas beaucoup aider non plus à croire en ce personnage de liégeoise de banlieue luttant pour garder son travail et sa dignité. Pourtant, ce « Deux Jours, Une Nuit » pourrait bien être le meilleur film des frères Dardenne. Grâce au talent d’écriture des deux auteurs d’abord, qui réussissent à se réinventer à chaque scène, imaginant à chaque fois des manières de réagir tout à fait crédibles pour leurs personnages. Quant à Marion Cotillard, elle démontre encore une fois sa capacité à endosser n’importe quel rôle et donne une intensité incroyable à son personnage de femme brisée mettant ce qui lui reste d’énergie dans un dernier acte de lutte. Rien que pour elle, le film vaudrait déjà la peine.
Deux Jours, Une Nuit
De Luc et Jean-Pierre Dardenne
Avec Marion Cotillard, Fabrizio Rongione…
Diaphana / Dinifan