La 10e récipiendaire Jane Fonda a reçu le Prix Lumière des mains du réalisateur Costa-Gavras. Entre ses tours de chants, ses plaisanteries et ses hommages, l’actrice, âgée de 81 ans, a conquis les 3’000 personnes de l’Amphithéâtre du Centre de Congrès.
« Lorsque nous avons annoncé au printemps que ce serait Jane Fonda qui recevrait le Prix Lumière, la planète entière fut enjouée. Le rue du Premier Film finit par être reconnue. La peinture, la littérature et la musique, nous ne savons pas où cela a été inventé. Le cinéma, nous le savons… C’est ici ! » – Thierry Frémaux.
C’est sur une reconnaissance nécessaire du travail fourni par le festival Lumière pour nous surprendre à chaque édition, pour la ville de Lyon et surtout pour le cinéma que la cérémonie a ouvert ses portes pour la dixième année consécutive. À chaque fois, le festival redonne une véritable stature à ce lieu mythique qui accueille les personnalités du cinéma français et international. Cette année, la récipiendaire n’a pas seulement émerveillé la ville natale du cinématographe par sa vitalité, sa joie et sa générosité. De même qu’elle ne s’est pas uniquement livrée à un panégyrique du festival, notamment lors de sa master class. Jane Fonda a aussi déclamé son amour pour la France, terre qu’elle a si souvent foulé, et sur laquelle elle tourna de multiples fois. Lorsqu’on lui a demandé ce qu’elle aimerait écouter pour cette remise de prix, il n’était donc pas surprenant qu’elle choisisse Edith Piaf. « Mon manège à moi » a résonné dans cette vaste salle par l’intermédiaire de Vincent Delerm qui a invité le public à l’accompagner au chant pour mieux « impressionner Jane Fonda » et donner une sublime « image de la France aux Etats-Unis ».
La comédienne française Dominique Blanc, qui « admire la comédienne » et trouve la femme « extraordinaire », a choisi de lire des extraits du Deuxième Sexe, tome I, de Simone de Beauvoir, afin de faire écho aux engagements politiques et au féminisme de l’actrice. « Entre les deux sexes, il n’y a pas encore d’égalité ». C’est d’ailleurs pour cela que Thierry Frémaux nous invita à regarder quelques extraits du prochain documentaire – encore inachevé – de Mark Cousins, en partie narré par Jane Fonda : Women making film. Anaïs Demoustier, Suzanne Clément et Anne Cosigny ont suivi cet élan en choisissant de lire un extrait de l’autobiographie de l’actrice, Ma vie. Après un bref interlude musical en compagnie de Nolwenn Leroy, qui a reprise La Quête de Jacques Brel, le cinéaste français et grec Costa-Gavras a offert un riche hommage à Jane Fonda en évoquant la vie cinématographique et militante de la « pure rebelle ». C’est en se remémorant sa rencontre avec cette « actrice citoyenne » sur le tournage des Félins de René Clément qu’il a vivement salué son « anti-conformisme qu’elle a imposé au conformisme d’Hollywood ». En rappelant qu’elle a collaboré avec une soixantaine de réalisateurs, il a par ailleurs évoqué son grand regret de n’avoir pu « travailler avec elle et elle avec lui ». Il a ajouté à ce propos : « Je crois savoir que ce souhait ne t’a pas non plus quitté. Seulement les conditions et les circonstances ne sont pas réunies. Ces désirs, resteront-ils à jamais platoniques ? ». C’est donc avec honneur et émotion que Costa-Gavras lui remis le Prix du Festival Lumière 2018.
Jane Fonda a avoué être « très touchée » par tout ce que le festival lui a consacré. L’actrice ne manqua pas d’apporter une énergie joyeuse et enfantine à cette soirée par ses heureux petits sauts, ses chants et ses discours emplis d’humour et d’auto-dérision. L’auditoire s’est amusé de ce ton libre qui a enchanté les formalités habituelles de cette cérémonie. « Les deux choses les plus importantes sont Lumière et l’amour ». Comme de coutume, c’est sur un morceau de musique que la salle et Jane Fonda s’abandonnèrent au chant avant de laisser l’obscurité envahir l’amphithéâtre pour qu’apparaisse Le Syndrome Chinois de James bridges.