Adapté d’une nouvelle de Ian McEwan, « Sur la plage de Chesil » relate avec justesse les différences sociales entre 2 jeunes personnes. L’amour et la douceur sont les principaux sentiments valorisés. Mais la vérité brute jaillira et fera également des dégâts.
En 1962, 2 jeunes Anglais d’une petite vingtaine d’années viennent de se marier. Bien que Florence et Edward semblent se sentir plutôt à l’aise dans leur relation au quotidien, leur première nuit d’amour s’avère beaucoup plus délicate. Dans un cadre parfait pour leur lune de miel, à savoir un bel hôtel proche de la plage de Chesil, l’ambiance change au fur et à mesure et ils se retrouvent finalement complètement tétanisés face à leurs désirs. Essayant de se sentir plus détendus, le couple se remémore leurs souvenirs depuis le début de leur rencontre. Florence, brillante violoniste, se souvient de son coup foudre éprouvé lorsqu’elle a croisé le regard d’Edward la toute première fois. Quant à lui, aspirant écrivant, il se rappelle pour quelles raisons il s’était rendu au congrès où ils avaient eu lieu leur dite rencontre.
Si le nom de Ian McEwan est pu connu du grand public, ses romans le sont davantage. D’ailleurs, « Sur la plage de Chesil » n’est de loin pas sa première transposition. Pour l’auteur, le succès commença au début des années 80 avec notamment un recueil de nouvelles « First Loves, Last Riters ». Auréolé de plusieurs prix au cours de sa carrière, le romancier est un multitâche que ce soit par rapport à ses écrits, mais aussi au niveau de la culture. Abordant ouvertement la perversion et différents interdits, il n’hésite pas à changer radicalement fréquemment de registres avec notamment l’humour noir et la cruauté au cœur de récits. De plus, Ian McEwan s’investit à de nombreuses reprises dans le 7ème Art puisqu’il scénarisa une partie de ses ouvrages, dont le très dramatique et reconnu « Bon fils » avec Elijah Wood (« Le Dernier chasseur de sorcières ») en 1993. D’autres de ses livres furent adaptés en films à l’exemple des récents « On Children Act » et « Sur la plage de Chesil ».
Une des forces de cette réalisation réside au travers de la splendeur des décors naturels. En effet, une grande partie des scènes ont été tournées en extérieur aux abords et sur la plage de Chesil qui est de toute beauté, même en hiver. Les différents cours fluviaux, les berges et les galets, points forts des lieux, sont sublimés avec finesse. Mais surtout, les performances de Saoirse Ronan (Lady Bird) et Billy Howle (« A l’heure des souvenirs ») sont remarquables et touchantes. Leurs interprétations comme couple dans les années 60 désireux de rester jeune ainsi que l’oppression qu’ils éprouvent vis-à-vis certaines traditions, créent une alchimie émouvante. Leur aisance et paradoxalement, maladresse, se reflètent à merveille. Le fameux flegme « so british » se perçoit également rapidement au travers de leur jeu d’acteurs. De ce fait, le côté tragique demeure malheureusement exprimé d’une manière trop subtile. Fait regrettable, car la force du message risque d’être plus floue par rapport au public.
Toujours est-il que cette œuvre cinématographique dégage une certaine poésie et permet de se remémorer qu’à une époque souvent (volontairement) oubliée, la grande majorité des mariages s’organisaient différemment. La musique a également toute son importance dans la fiction parce que d’une part, elle rappelle le côté rebelle du rock dans les années 60. Mais aussi, car les morceaux instrumentaux créés amènent une ambiance en contradiction avec les plans filmés.
En définitive, « Sur la plage de Chesil » est doté d’une mise en scène contenant de nobles sentiments et une belle candeur, tout en restant dans l’esprit de films d’auteur. Il risque donc de ne pas plaire aux spectateurs-trices appréciant les œuvres cinématographiques, plus explosives ou amusantes. Quant aux autres, le moment à passer pour découvrir le long-métrage sera divertissant et enrichissant.
Sur la plage de Chesil (On Chesil Beach)
UK – 2018 – 110 Min. – Drama
Réalisateur: Dominic Cooke
Acteur: Saoirse Ronan, Emily Watson, Samuel West, Anne-Marie Duff, Billy Howle, Bebe Cave, Adrian Scarborough, Bernardo Santos, Jonjo O’Neill, Philip Labey
impuls
15.08.2018 au cinéma