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dimanche, décembre 22, 2024
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« BlacKkKlansman » : Où s’arrête la fiction ?

Pauline Brandt
Pauline Brandt
Avec un master de français moderne avec spécialisation en études théâtrales, un bachelor en français moderne et histoire et esthétique du cinéma, Pauline Brandt met en œuvre tout son savoir-faire pour promouvoir le cinéma.

Spike Lee est de retour. Le cinéaste américain réalise BlacKkKlansman, salué cette année au Festival de Cannes. À quoi s’attendre ? À un cri d’alarme efficace. À l’adaptation d’une histoire vraie qui dépasse toute fiction. À un tour dans l’Amérique des années 70, entre racisme institutionnel et Black Power. Mieux : à faire face à une réalité.Foreal, foreal sh*t.


Après plusieurs années d’absence, Spike Lee frappe l’Amérique de Trump là où ça fait mal et adapte l’ouvrage autobiographique « Black Klansman », qui révélait la manière dont Ron Stallworth (interprété par John David Washington), première recrue afro-américaine de la police de Colorado Springs, est parvenu à infiltrer le Ku Klux Klan à la fin des années 70. Fait d’improvisation et de culot, le procédé est simple : Ron se charge de rentrer en contact téléphonique avec les membres, échangeant progressivement avec eux allant même jusqu’à rentrer en contact avec le plus haut placé du Klan, le politicien David Duke (âgé de 68 ans à ce jour, ce dernier milite toujours librement pour la suprématie blanche.).

Les rencontres et les réunions seront assurées par son collègue blanc Flip (Adam Driver). Lui est Juif, mais ne s’est jamais vraiment questionné sur les dynamiques d’oppression. « C’est juste un job », avance-t-il d’abord. Se créé donc une façon risquée et pour le moins burlesque d’infiltrer l’organisation : cela donne lieu à des séquences qui font la peinture d’un système profondément raciste d’où émerge une forme de comédie. Le militantisme s’assortit d’une réflexion sur la représentation. L’absurde parvient même à faire rire. Bien joué.

Le film a ses moments de faiblesse (une histoire d’amour un peu plate, des séquences vaguement déconnectées de l’ensemble), mais elles sont surpassées par la rage dont il fait preuve et l’efficacité par laquelle la réalité se lit en filigrane. C’est aussi une histoire de l’identité noire et du racisme à l’américaine par le biais du cinéma qui se déroule, de Naissance d’une nation et Autant en emporte le vent à Cleopatra Jones. Un rythme enlevé, soutenu par des épisodes de montage alterné entre militants Black Power et aspirants du Klan, permet une narration ardente : on passe du film de détective à la comédie.

Toute forme de rire est balayée en conclusion du film, lorsque la fiction cesse et un raccord avec des images récentes s’effectue. Lee interpelle son spectateur : à l’écran, se succèdent l’enregistrement d’un discours de David Duke, l’appel de Trump indiquant que des « personnes très respectables » existent parmi les suprémacistes blancs avant d’enchaîner sur la marche néo-nazie de Charlottesville. Le film est dédié à Heather Heyer, morte lors du contre-défilé de la même ville appelant à la justice sociale. C’était en 2017. Plus possible de rire.

BlacKkKlansman – J’ai infiltré le Ku Klux Klan
USA   –   2018   –   128 Min.   –   Drama
Réalisateur: Spike Lee
Acteur: Adam Driver, Topher Grace, Laura Harrier, Ryan Eggold, John David Washington, Robert John Burke, Jasper Pääkkönen, Corey Hawkins, Paul Walter Hauser, Harry Belafonte
Universal Pictures
22.08.2018 au cinéma

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