Dans la peau de ce héros déchu, Ben Foster (3h10 pour Yuma, X-Men l’affrontement final) trouve ici le rôle qui devrait faire décoller sa carrière.
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ans son nouveau film, “The Program”, Stephen Frears s’attaque à une autre personnalité vivante après “The Queen” en 2006. Mais cette fois-ci il ne s’agit pas d’une reine mais plutôt d’un roi, le roi du cyclisme, en la personne de Lance Armstrong. Et pour incarner celui qui a remporté 7 Tours de France en se dopant, le réalisateur britannique a choisi l’acteur américain Ben Foster. Nous l’avons justement rencontré lors de son passage au dernier Festival du Film de Zurich en septembre où il venait présenter le film.
Non seulement, il fallait être un bon acteur pour jouer ce rôle mais il a fallu passer par une transformation physique, n’est-ce-pas ?
Ben Foster : J’ai suivi un programme, pas vraiment le même que celui de Lance et de ses équipiers mais une mini version, le tout suivi par un médecin car je voulais bien comprendre le processus par lequel ils étaient tous passés. Le film s’appelle très justement “The Program”. Ce n’est pas un biopic sur la vie de Lance Armstrong mais plutôt comment il a mis au point ce programme. Il était important pour moi de comprendre aussi bien les substances chimiques qu’ils avaient prises que le régime alimentaire qu’ils avaient suivi. Je ne voulais pas paraître comme un amateur sur mon vélo alors j’ai du m’entraîner avec un professionnel du cyclisme.
Combien de temps aviez-vous pour vous transformer en un pro du vélo ?
Six semaines seulement.
Ce n’est pas beaucoup ?
Oui je sais mais c’était les règles du jeu et j’ai fait un peu comme un étudiant qui passe un examen, je me suis mis à fond dans le boulot en un minimum de temps!
Même si ce n’est pas un biopic, vous deviez interpréter une personne qui est toujours vivante. Ce n’est pas un peu dérangeant ?
C’est très intimidant car comme vous le dîtes Lance Armstrong est vivant et son histoire n’est pas terminée. Il a des enfants, des amis et de la famille. C’est un homme compliqué mais l’ayant beaucoup étudié, c’est un homme empathique.
Il faut certainement trouver des aspects positifs pour pouvoir interpréter ce personnage…
Oui sinon cela aurait été impossible pour moi de le faire. Il faut aimer la personne qu’on interprète.
Vous avez essayé de le contacter ?
Oui mais il a refusé de me rencontrer ou de me parler.
Que lui auriez-vous dit si vous l’aviez rencontré ?
Je ne lui aurais rien dit mais je lui aurais posé tout un tas de questions. Mais je n’ai pas eu ce luxe et je ne lui en veux pas. J’étais entouré par des gens qui étaient avec lui pendant cette période de sa vie, qui faisaient partie de ce scandale et eux voulaient parler. C’était comme un fardeau pour eux de porter ce secret depuis si longtemps.
C’était peut-être enfin un moyen de faire du nettoyage dans leur conscience…
J’espère, j’espère. Ils étaient tout d’abord nerveux de parler. Il y avait beaucoup de gens touchés par cette histoire, les nutritionnistes, les masseurs, les responsables de l’équipe…
Vous interprétez Lance Armstrong à merveille. C’est très bluffant. Est-ce un tournant dans votre carrière ?
Je ne sais pas, je suis en train d’en parler avec vous et c’est déjà très positif. J’espère juste que les gens iront voir le
film !
Il semblerait qu’à Hollywood, ce genre de rôle qui demande une transformation physique, est nécessaire pour obtenir un Oscar ou la reconnaissance du public et de la profession. Qu’en pensez-vous ?
Disons que je travaille dans le cinéma depuis plus de 20 ans avec des réalisateurs que j’aime et je me considère très chanceux. Ma vie est restée privée et je ne vois pas en quoi je devrais obtenir aujourd’hui cette reconnaissance dont vous parlez.
Quand on vous voit aujourd’hui en chair et en os en “Ben Foster”, on ne voit pas vraiment la ressemblance avec Lance Armstrong…
Je suis heureux d’avoir réussi mon coup !
Comment avez-vous travaillé ce personnage pour l’imiter à ce point ?
J’ai vu énormément de vidéos. Il existe beaucoup d’images de lui et je suis chanceux d’appartenir à la génération youtube qui m’a permis de visionner toutes ces archives. Si vous êtes comme moi intéressé par les devoirs de recherche – c’est d’ailleurs la partie qui m’éclate le plus dans mon boulot – il y a beaucoup de ressources sur internet. J’ai du créer ma propre version de Lance car je ne voulais pas que juste l’imiter.
Mais quand Stephen Frears vous a offert le rôle, avez-vous vu une ressemblance physique entre vous deux ?
Disons que travailler avec Stephen Frears est de prime abord excitant. Ensuite j’étais ravi d’en savoir plus sur un sujet qui m’était complètement inconnu, le cyclisme. C’est le plaisir de ce métier, de connaître des choses vers lesquelles on ne serait pas forcément allé. Donc je ne pouvais pas dire non. J’ai juste dit : “Oui ! Quand est-ce qu’on commence ? Combien de temps j’ai pour m’entraîner ?”
Pensez-vous que son mea culpa a permis de changer quelque chose dans le milieu du cyclisme ? On parle du dopage bien sur…
Non et c’est le cas dans tous les milieux sportifs malheureusement. En revanche, ce qu’il a fait, c’est réunir près d’un demi milliard de dollars pour la recherche contre le cancer et c’est très impressionnant. Sa fondation existe toujours et il a donc sauvé des vies. C’est plutôt une bonne chose.
Il y avait donc un côté Dr Jekyll et un autre Mr Hyde chez lui…
Oui au moins deux côtés, si ce n’est plus !
Quand on raconte ce genre d’histoire, doit-on obtenir des droits à l’image de la personne privée ?
Il y avait beaucoup d’avocats impliqués. Ce qui était important, c’était que Stephen Frears raconte la vérité car en cas de litiges, on était protégé. Car même si c’est un film, il est basé sur des faits réels.
Savez-vous si Lance Armstrong a vu le film ?
Non je ne sais pas.