Pour sa première réalisation, Zoltán Mayer s’attaque à un sujet sensible : le deuil.
Les séquences inaugurales de « Voyage en Chine » présentent Liliane, une aide-soignante d’un certain âge qui peine à dissimuler sa tristesse latente – une impression renforcée par sa relation avec son mari. Un soir, le téléphone sonne. Depuis l’extérieur de la maison, la caméra assiste au drame sans jamais l’exposer.
C’est avec cette pudeur que Mayer illustrera la poignante pérégrination de cette mère traversant le globe pour rapatrier le corps de son fils défunt. Le respect que le réalisateur montre à son sujet étonne fortement, puisque l’on sait à quel point il est plus aisé de solidariser les spectateurs en usant de pathos. Contre toute attente, Mayer favorise le hors-champ, le décadrage et les gros plans sur des parties corporelles précises. Lors d’une fête commémorative, la tristesse de Liliane et de l’amante de son fils n’est ainsi dépeinte qu’à travers de sobres plans sur leurs mains, dont la gestuelle s’avère tout aussi communicative que l’aurait été des cadrages moins subtiles sur les larmes ruisselantes des protagonistes. L’autre force du film réside dans sa capacité à faire ressentir la solitude de sa protagoniste dans l’un des pays les plus peuplés du monde. Parachutée dans une civilisation et une culture qu’elle ne comprend guère, Liliane débutera son périple isolée de tout, avant que ses rencontres progressives ne l’aident dans sa quête physique et spirituelle. Cette réussite tient au scénario et à la mise en scène, mais surtout à Yolande Moreau qui incarne très justement cette femme forte mais meurtrie. « Voyage en Chine » s’offre comme une réflexion touchante sur le rapport aux autres qui nécessite toutefois un certain investissement de la part des spectateurs.
Voyage en Chine
De Zoltán Mayer
Avec Yolande Moreau, Qu Jing Jing, André Wilms
Agora Films
Sortie le 25/03